Pierre Nantel est-il opportuniste ?

Pierre Nantel, député du Nouveau parti démocratique dans Longueuil–Saint-Hubert depuis 2011, vient d’annoncer son ralliement au Parti vert du Canada, quelques jours après avoir été exclu de son parti d’origine suite à l’ébruitement de ces discussions. Les accusations sont arrivées assez vite : Pierre Nantel a toujours été franc-tireur, il roule pour lui, il va au plus offrant, car il risquait d’être battu et que les verts sont en hausse sondagière alors que le NPD est en décrue. De fait, les projections de divers instituts synthétisées par 338Canada indiquent le NPD troisième, largement distancé par le Bloc et les libéraux… Mais les verts sont données cinquièmes ! Certes ces synthèses de scores nationaux projetées sur les circonscriptions ont une forte marge d’erreur, mais enfin, on peut parler d’un pari pour le moins risqué.

Sur le plan des convictions oui Nantel est un franc tireur. Il s’est démarquéde son parti en expliquant que les signes religieux trop voyants de son chef causeraient des problèmes avec l’électorat québécois et a pris position pour une déclaration de revenus unique gérée au Québec plutôt que d’en faire une fédérale et une provinciale. Cela allait contre la vision du NPD, défendant les positions des syndicats, mais il paraît là aussi difficile d’en faire un point de clivage suffisant.

Par ailleurs ces deux distinctions auraient amené plus logiquement Nantel vers le Bloc québécois. Ce d’autant que le parti lui a tendu la main en début d’année, assez fort pour que les choses fuitent, et le député n’avait pas fermé la porte. Le parti indépendantiste étant bien mieux positionné pour gagner l’élection dans cette circonscription, un pur opportuniste aurait logiquement fait ce choix plutôt que le pari risqué du parti vert. Certes, dans les dernières projections les écologistes quadruplent leur score de 2015, mais ça ne les fait que passer à un peu moins de 10 %, pas vraiment un fief. Pour certains, c’est parce qu’il s’est fait finalement fermer la porte au Bloc que Nantel serait aller voir les verts, pourquoi pas, mais cela reste curieux alors que le NPD (toujours mieux placé que les verts) lui accordait encore l’investiture.

On peut aussi porter crédit à M. Nantel de plusieurs engagements forts liés à l’écologie : il a porté très fortement le dossier de l’électrification des transports (non nucléaires au Québec), avait écrit en décembre 2018 une lettre ouverte à tous les chefs de partis pour s’engager dans un « un front commun pour sauver notre climat », en s’engageant sur des objectifs massifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il a aussi été le premier député à avoir ajouté le respect des traités avec les autochtones à son serment, un acte symbolique important, l’intérêt sincère pour la question des premières nations est cependant commun au NPD et aux Verts.

Juger sur la sincérité du ralliement de M. Nantel au parti vert est donc bien difficile, hormis sans doute pour lui. À tout le moins ses actions passées comme les conditions de son départ rendent ce ralliement moins absurde que celui de José Nuñez-Melo en 2015. Le député NPD de Laval avait lui aussi été exclu du NPD, parce qu’il refusait d’avoir des adversaires dans une investiture, adversaires soutenues par beaucoup au parti car la présence de Nuñez-Melo avait été pour le moins fantomatique durant son mandat1. Il avait alors rejoint le Parti vert, sans être pour autant le premier député vert reconnu, la Chambre étant déjà dissoute2. Son ralliement était clairement celui d’un homme voulant sauver son siège et les électeurs ne s’y étaient pas trompé : il avait obtenu 2,36 %, résultat assez négativement exceptionnel pour un sortant.

Pierre Nantel n’est clairement pas dans la même situation. L’avenir seul saura nous dire s’il restera fidèle au parti vert ou si ça n’est qu’une passade, plus ou moins sincère. Mais en tous les cas son ralliement n’est pas incohérent, même s’il est certain que la forte tête qu’il est saura s’en distinguer par moment – comme il l’a fait au NPD ou l’aurait fait s’il avait rejoint le Bloc –, en suivant ses convictions. Il y a plus déshonorant.

1 Il n’avait pas pris la parole en Chambre avant plus d’un an et demi de mandat et ne siégeait dans aucune commission à part… celle de la bibliothèque du Parlement, qui a une fonction purement symbolique !

2 Ce n’est pas le cas de M. Nantel, qui aurait put être le premier député vert du Québec, mais il a fait le choix de rester siéger comme indépendant jusqu’à la dissolution.

Crédit Photo : Facebook de Pierre Nantel / Daniel Green, Elizabeth May et Pierre Nantel le 20 août 2019.

Entretien avec Halimatou Bah, candidate verte dans Saint-Laurent

Créé en 2001, le Parti vert du Québec a su exister dans le paysage politique sans réussir pour le moment à percer comme on put le faire des partis dans d’autres provinces. Ayant pris depuis 2013 un virage écosocialiste et fédéraliste, il présente des candidats dans la quasi-intégralité des circonscriptions du Québec, et est le parti à la moyenne d’âge la plus basse. S’il peine parfois à se faire entendre dans un pays où le mode de scrutin reste peu tendre pour les petits partis, il était temps que sa parole soit entendue sur ce site. Après avoir observé plusieurs profils de candidats, nous avons choisi d’interroger Halimatou Bah, candidate verte dans Saint-Laurent, dont le profil, le parcours international (d’ailleurs passé par l’ouest de la France) et les combats locaux propres à sa circonscription nous semblaient particulièrement représentatifs.

Avant de débuter, pouvez-vous présenter votre parcours en quelques phrases et ce qui vous a poussé à vous lancer en politique pour la première fois ?

Je suis née et j’ai grandi à Dalaba une préfecture qui se trouve en République de Guinée. Après l’obtention de mon baccalauréat, j’ai été admise à l’université de Rennes 1 en droit. Après ma licence de droit je suis venu m’installer à Montréal ou j’ai obtenu un diplôme de 1er cycle en science politique que j’ai adorée. Actuellement, je finalise une maîtrise en administration publique à l’ENAP (école nationale d’administration publique) de Montréal.

Mon expérience de député junior à l’Assemblée nationale en Guinée m’a fascinée sur la politique et a orienté mon parcours scolaire. Mais le déclic est arrivé pendant un cours en politique et environnement que j’ai eu à l’UQAM (université du Québec à Montréal). En effet, j’ai perçu l’ampleur du dégât que l’homme a fait et continue à faire à l’environnement et aussi l’ampleur du pouvoir des politiques publiques sur les questions environnementales. Ces deux constats m’ont à faire un choix, être spectatrice et laisser une planète détruite à mes enfants ou être actrice en essayant de mettre l’environnement au cœur des enjeux politiques, j’ai choisi la deuxième option. Après avoir passé en revue le programme de tous les partis politiques au Québec, mon choix s’est porté vers le parti vert. C’était le seul parti qui non seulement concordait avec mes valeurs, mais qui prône également un changement important sur nos façons de faire pour protéger notre environnement.

En tant qu’écologiste on entend souvent dire « mais pourquoi vous dîtes vous de gauche, c’est limitant, et puis pourquoi un parti vert alors que tous les partis font de l’écologie », que répondez-vous à cela ?

Les autres partis font de l’écologie que j’appellerais de minimaliste, l’enjeu environnemental n’est jamais au cœur des débats. La preuve lors du dernier débat entre les principaux candidats en lice à la télévision, l’environnement n’était pas dans le sujet du face à face. C’est une honte que l’immigration soit une préoccupation plus grande que l’environnement. Le Parti vert du Québec, à l’inverse des autres partis, fait de l’écologie son cheval de bataille, avec une vision écosocialiste. Cela implique de protéger l’environnement tout en offrant des services publics de qualité à la population.

Le parti vert du Québec, très préoccupé par les inégalités sociales et le besoin de bâtir une société plus juste et plus équitable, a un programme de gauche qui vise la réduction des inégalités sociales. C’est pourquoi on appuie l’augmentation rapide du salaire minimum pour atteindre 15 $/h d’ici le printemps 2019. Cette augmentation du salaire minimum sera combinée avec des modifications au Code de travail, qui interdit aux employeurs de réduire les bénéfices (pauses café, assurances maladie) pour contrer la hausse du salaire minimum. Aussi, nous proposons d’instaurer un revenu minimum garanti de 1200 $ par mois afin de sortir l’ensemble des Québécois-es de la pauvreté. Ce montant sera bonifié pour les personnes atteintes de maladies ou d’un handicap physique ou mental.

Vous avez un parcours qui traverse de nombreux pays, dans votre profession de foi vous insistez d’ailleurs sur l’importance d’une meilleure reconnaissance des diplômes étrangers. Écologie et internationalisme vont de pairs ?

Le réchauffement climatique montre de façon très concrète qu’écologie et internationalisme vont de pair. En effet, de la même façon, que l’air que nous respirons n’a pas de frontière, les dégâts environnementaux des uns touchent aussi les autres, car, que ça nous plaise ou pas nous partageons tous la même planète. Et si, tous les pays du monde ne travaillent pas d’un commun accord pour limiter les saccages, les conséquences environnementales sont immenses, et les pays pauvres en sont les plus touchées. Le réchauffement climatique ne touche pas qu’un seul pays, mais le monde entier. L’Afrique est le continent qui pollue le moins en termes de gaz à effet de serre et pourtant elle n’est pas épargnée par les ravages faits à l’environnement (sécheresses à foison, inondation à répétition, etc.) et aucune compensation financière ne peut freiner ces dégâts. D’ailleurs, j’ai en tête d’aller dans les pays où les questions environnementales sont moins perçues et compris pour les sensibiliser encore et encore sur l’impact que peuvent avoir nos comportements sur la planète. L’Accord de Paris est clair là-dessus, si nous voulons limiter le réchauffement climatique de 1,5 degré les pays du monde entier devront unir leurs forces pour atteindre la carboneutralité d’ici l’année 2050.

Vous mettez en avant la défense de l’environnement dans le « Technoparc » de Saint-Laurent. Quelles sont les problématiques urgentes sur ce site et quelles réponses souhaitez-vous y apporter ?

Le Technoparc dans l’arrondissement de Saint-Laurent est l’un des plus grands parcs scientifiques au Canada. Trois milieux humides abritant des espèces importantes d’oiseaux et d’animaux aquatiques se trouvant sur le site du Technoparc sont menacés. En effet, la construction prévue de l’éco-campus Hubert-Reeves ainsi que le tracé du futur train du Réseau électrique métropolitain (REM) qui va passer aussi sur ce terrain détruira une bonne partie d’un des marais et asséchera la portion sud du milieu humide. La fonction écologique exercée par les milieux humides est une richesse inestimable pour les espèces qui y vivent.

Le parti vert du Québec veut limiter les interventions sur ces milieux de vie, nous voulons faire en sorte qu’on reconnaisse l’apport des marais dans notre écosystème, enfin, nous estimons qu’un parc nature devrait être créé à cet endroit non seulement pour protéger les espèces qui y vivent, mais aussi pour doter Montréal d’un endroit paisible et vert qui attirera les ornithologues du monde entier et des familles.

 Les élections ont eu lieu, vous êtes député, quel est le premier projet de loi que vous souhaiterez déposer ?

Le premier projet de loi que je souhaite déposer sera un projet de loi sur l’augmentation du prix carbone et l’instauration d’un système de rationnement de combustible fossile.

En effet, l’avis des experts est clair ; pour réduire les gaz à effet de serre et lutter contre les changements climatiques, nous devons poser des gestes concrets pour réduire la consommation d’essence et d’énergies fossiles. C’est pour ces raisons que le parti vert du Québec propose d’augmenter le prix du carbone à 200 $ la tonne en 2019 avec une augmentation de 25 $ par année par la suite. En 2017, le Québec a consommé près de 10 milliards de litres d’essence, surpassant toutes les années précédentes, aussi, les deux tiers des véhicules vendus étaient des VUS ou des camions légers. Le statu quo n’est pas durable, il est temps de poser des gestes concrets pour lutter contre les changements climatiques et les émissions provenant du domaine des transports et en sens j’estime que le bâton peut-être plus efficace que la carotte.

Rencontre avec Elizabeth May, députée et cheffe du Parti Vert du Canada

Lors de mon voyage au Québec et Canada au mois d’avril, j’ai eu la chance de voir nombre d’événements politiques, et d’interviewer plusieurs élu.es. Étant membre d’Europe Écologie – Les Verts, de son conseil fédéral (une sorte de parlement interne) et dont j’étais à l’époque élu (conseiller municipal de Laval, en France, à préciser car la ville a un homonyme qui est la 3ème plus grande ville du Québec !), j’ai proposé d’aller rencontrer la cheffe du parti frère au Canada.

Elizabeth May, dont le parcours de militante environnementale puis de députée ultra-présente, réussissant à gagner des points alors qu’elle est la seule verte à la Chambre des communes, tout en restant impliquée dans les luttes sociales et environnementales, m’a toujours beaucoup impressionné. C’est avec une grande joie (et un peu de fierté) que je suis allé la rencontrer avec une série de questions construite avec le bureau exécutif et la commission transnationale d’EÉLV. Malheur, il y a eu une erreur d’agenda et j’ai raté une partie du rendez-vous, qui fut plus court que prévu, mais Mme May et son équipe m’ont accordé un peu de leur précieux temps et ont accepté de répondre à nos questions, et en français s’il vous plaît !

Petite anecdote avant les questions à proprement parler, les députés ont souvent un ou deux drapeaux devant leurs bureaux. Le plus fréquent est celui du Canada, parfois on voit celui d’une province (j’ai pu voir celui du Nunavut et du Québec, seul présents dans le cas de députés indépendantistes), ou d’une communauté (franco-ontariens par exemple). Devant le bureau de Mme May, tout un symbole, le drapeau Canadien côtoie celui… de la planète Terre !

Vous avez été élue pour la première fois en 2011, sept ans plus tard, quel est le panorama de l’écologie politique au Canada ?
Depuis que j’ai été élue, nous avons vu une dynamique verte croître à travers le pays. Je pense que les Canadiens ont vu la différence qu’un seul député vert peut faire. Au niveau provincial, il y a deux verts élus à l’Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick, et trois verts élus qui ont la balance du pouvoir en Colombie-Britannique. Le chef du Parti vert de l’Ontario mène les sondages dans sa circonscription, une semaine avant l’élection provinciale [il a bien été élu jeudi, devenant le premier élu vert de l’Ontario].

Le CETA a été adopté, malgré l’opposition des écologistes européens et canadiens, vous reste-t-il des perspectives de lutte au Canada ?
Les Verts de tous les parlements de la planète doivent continuer de travailler ensemble à l’élaboration de nouveaux accords commerciaux internationaux en vertu desquels les grandes compagnies devront assumer davantage de responsabilités avant de pouvoir obtenir de nouveaux droits.

Ensemble, nous pouvons éliminer les accords [renfermant de telles dispositions] dont l’objectif est en fait de donner encore plus de pouvoirs à ceux qui en possèdent déjà beaucoup et plus d’argent à ceux qui sont déjà riches. Nous pouvons mettre en place des accords qui protégeront les personnes marginalisées et désavantagées, et travailler à l’élaboration d’accords commerciaux justes et équitables, qui profiteront à l’ensemble des humains.

Dimanche, vous étiez arrêtée lors d’une manifestation contre un pipeline, un type de combat que vous menez régulièrement. Dans les discours le Canada dit vouloir réduire son recours aux énergies fossiles mais alors pourquoi tout ces projets pétroliers ?
Il sera impossible pour le Canada de réduire nos recours aux énergies fossiles et d’atteindre les objectifs de l’Accord de Paris avec  la construction de l’oléoduc Kinder-Morgan. Le Parti libéral avait promis de cesser de subventionner l’industrie des carburants fossiles durant la campagne de 2015 [depuis, le gouvernement a annoncé qu’il rachetait le pipeline face aux hésitations des compagnie, afin de pouvoir revendre l’équipement pétrolier une fois construit].

Les libéraux ont récemment recommencé à attaquer l’ancien gouvernement Harper en vue de l’élection de 2019, mais quelle est la différence ? Avec le gouvernement de Justin Trudeau, les Canadiens croyaient enfin pouvoir compter sur un leadership environnemental – moi-même inclus. Mais c’était un leurre. Les libéraux financent l’industrie pétrolière et décident de soutenir un secteur dont l’économie mondiale veut progressivement se passer.

Quand vous parlez du problème des pipelines, vous abordez souvent le sujet des autochtones, comment liez-vous écologie et premières nations ?
Le Canada a signé la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. En imposant le pipeline de Trans Mountain, le gouvernement canadien contrevient à l’article 32 de cette déclaration. Le gouvernement du Canada entache l’honneur de la Couronne en ignorant les droits des Premières Nations qui sont enchâssés dans la Constitution canadienne. À titre de signataire de cette déclaration, le Canada a l’obligation de « (…) [consulter] les peuples autochtones concernés et (coopérer) avec eux de bonne foi par l’intermédiaire de leurs propres institutions représentatives, en vue d’obtenir leur consentement, donné librement et en connaissance de cause, avant l’approbation de tout projet ayant des incidences sur leurs terres ou territoires et autres ressources (…). »

Cette obligation n’a pas été respectée par le processus d’approbation provisoire des projets de 2016. Le panel de trois personnes chargé d’examiner les préoccupations publiques relatives au pipeline de Kinder Morgan ne respectait pas plus l’engagement d’une prise de décision basée sur des faits ni les droits des peuples autochtones. Le panel de trois personnes n’a pas recommandé l’approbation du projet de pipeline ni contribué aux données scientifiques se rapportant au projet.

De plus, il est impossible de ne pas lier l’écologie et premières nations – au sujet de leurs cultures, santé, droits, terres ancestrales… c’est toujours connecté.

Enfin, on compare souvent Trudeau et Macron. En France on a encore des difficultés à appréhender le cas Macron, vous avez un peu plus de recul depuis 2015. Comment les Verts Canadiens appréhendent-ils cet adversaire jeune, très communicant, qui fait de grands étalages de foi écologiste ?
Le leadership affiché à la COP21 de Paris et la ratification rapide de l’Accord de Paris garantissait une une note positive à Trudeau. L’engagement à l’égard de la tarification du carbone, malgré une certaine résistance des provinces, nous emmène au descriptif ci-dessus.

Mais il est difficile de bien évaluer un gouvernement qui maintient les mêmes faibles cibles climatiques que le précédent gouvernement conservateur. Cette cible – 30 % sous les niveaux de 2005 d’ici à 2030 – est irréconciliable avec l’Accord de Paris. L’Accord de Paris a fixé l’objectif de limiter la hausse des températures moyennes mondiales à 1,5 oC tout au plus, ce qui exige une cible bien plus exigeante que celle établie par le gouvernement Harper. De plus, comme l’a judicieusement remarqué Julie Gelfand, commissaire à l’environnement du Bureau du vérificateur général, les Libéraux semblent avoir oublié l’engagement de Copenhague – soit une réduction de 17 % sous les niveaux de 2005 d’ici à 2020. Les plans ont tous été conçus pour atteindre la faible cible du gouvernement Harper en 2030, et même cette cible semble hors d’atteinte.

Le programme libéral avait promis de mettre fin aux subventions accordées pour les combustibles fossiles, mais les budgets de 2016 et de 2017 n’ont annoncé aucune mesure du genre. Les Libéraux avaient également promis le rétablissement d’une approche scientifique, mais la science du climat est aussi négligée qu’elle l’a été durant l’ère Harper. Le manque du soutien du gouvernement a provoqué la disparition du réseau pancanadien de la science du climat, le Forum canadien du climat.

Devant l’approbation de projets de gaz naturel liquéfié qui font monter les GES, et la choquante achat de Kinder Morgan, au mépris de ses promesses électorales, il est difficile d’admettre que les Libéraux croient vraiment que « l’environnement et l’économie vont de pair », comme ils se plaisent à le dire. Cette affirmation est pourtant vraie, mais seulement lorsque les décisions ne s’annulent pas les unes les autres.

[juiz_sps]

Le Grand retour

D’octobre 2013 à juin 2015 je tenais un blog sur la politique québécoise et canadienne, blog au succès sans doute mitigé mais plutôt satisfaisant. Durant ces deux ans, j’avais pu interroger nombre d’acteurs et actrices politiques, dont les destins ont évolué (de la défaite à la victoire), pu également tenter d’éclairer les français sur le système d’outre-Atlantique et faire des chroniques d’opinion. Je m’engageais évidemment parfois pour tel ou tel – je reste fermement convaincu que le Québec doit être indépendant et de gauche (pas l’un ou l’autre) – mais a posteriori ce sont vraiment les textes dont l’objet était de comparer les systèmes (ainsi de l’article sur les suppléants, ou sur le Front national et l’indépendance) qui me semblent les plus intéressants.

En cette année électorale pour le Québec, où l’on dépasse le mi-mandat pour Trudeau au Canada, et où la France se pose des questions constitutionnelles (avec notamment la question du référendum d’indépendance en Nouvelle-Calédonie) l’envie me prend de relancer ce projet.

Beaucoup de choses ont changé depuis 2015,  mais mon intérêt (expliqué dans ce premier post en 2013) n’a pas changé et l’objectif non plus, vous trouverez ici des articles, chroniques, notes de lectures et entretiens autour de la politique québécoise et canadienne. L’axe est ouvertement militant, c’est un militant écologiste, de gauche et indépendantiste qui vous parle, ce qui n’empêchera pas de recevoir des personnes hors de ce spectre.

J’ai rechargé sur cette plateforme la majorité de l’ancien site, pas tout car c’est long, mais l’essentiel y est (notamment tous les entretiens). On retrouve toujours les textes sur la plateforme originelle, à l’abandon.

Entretien avec Audrey Boisvert, militante multi-fonctionnelle

Si elle s’est fait discrète depuis quelques années, Audrey Boisvert reste ancrée dans la mémoire des électeurs de Laval et du Québec. En 2005, à 18 ans, elle se présente face à l’inamovible Gilles Vaillancourt et obtient 18% des voix, les médias suivent de près cette jeune femme aux convictions bien accrochées qui n’a pas peur de se jeter dans l’arène. Une seconde étape est franchie quand elle est candidate, en 2008, pour Québec Solidaire dans Vimont en 2008 (4,3 %). Puis elle s’en va vers la Gaspésie et quitte la vie publique pour se consacrer à l’écologie concrète, une autre forme de politique. Entretien avec une militante qui n’a cessé de se battre.

Avant de parler strictement politique, peux-tu te présenter à nos lecteurs, expliquer d’où-tu viens, quelle est ta formations, quelles sont tes valeurs clefs, ce que tu fais aujourd’hui, etc. ?

Tout d’abord, je suis native de Laval, la troisième plus grande ville au Québec. Sa caractéristique principale est qu’elle est la banlieue de Montréal. Jusqu’à 16 ans, je ne me suis pas trop questionnée sur mon environnement ayant grandie dans une famille bienfaisante.

C’est entre 16 et 18 ans que j’ai premièrement acquis un esprit critique face à ma ville et à la société en général. Je me suis impliquée dans un organisme qui s’appelle le Forum Jeunesse de Laval et qui gérait de grosses sommes d’argent pour des projets jeunesses. C’est grâce à eux, entre autres, que je me suis de plus en plus intéressés à la vie politique municipale. À peu près au même âge, je suis entrée au Cégep Ahuntsic pour faire deux ans d’études en sciences humaines. J’ai participé à recréer le comité d’environnement étudiant.

En 2005, une grève étudiante s’est déroulée partout au Québec et ce fût une expérience super enrichissante qui m’a permis de rencontrer des gens ayant les mêmes valeurs que moi et aussi de participer de façon active aux événements militants. Nous avons fait la grève pendant 10 jours, dormant au cégep et participant à des manifestations tous les jours. C’était le début d’une conscience sociale et d’un devoir de participer à l’amélioration des conditions de vie pour tous et toutes.

Ensuite, en 2007, je suis allée à l’université en travail social. Ces études allaient dans le sens d’une plus grande justice sociale, d’une meilleure compréhension des enjeux sociaux actuels et d’une augmentation des outils pour réussir à faire une différence. Après mon BAC, en 2010, direction Gaspésie, région éloignée du Québec. Je me suis installée et j’ai travaillé pour le gouvernement et pour un organisme sans but lucratif. J’y ai rencontré de fabuleuses personnes! Je me suis impliquée dans plusieurs projets et organismes dont le centre de femmes de mon village Femmes en Mouvement et les soirées de slam/poésie.

Pendant mon séjour à Bonaventure, avec des amis, nous avons démarré un projet de communauté intentionnel qui s’appelle le Manoir. ( www.triple-brain.org/manoir)

Présentement, après avoir voyagé un peu partout au Québec au début 2014, je me suis installée depuis le mois de mai aux États-Unis, en Virginie, dans une communauté intentionnelle vivant et partageant mes revenus avec 100 autres personnes. Cette communauté s’appelle Twin Oaks et a des valeurs d’égalité, de féminisme et de non-violence.

Tu as dit que ta candidature en 2005 avait « marqué l’imaginaire collectif », ce qui est indéniable. Au delà de ton âge, le fait de n’avoir pas d’expérience politique et d’être une femme étaient autant de handicap dans un monde politique macho, vieillissant et peu ouvert, et pourtant tu as obtenu un score très honorable. Comment est-née cette candidature, et comment as-tu décidé d’y aller ?

Cette candidature est née surtout à cause d’un excellent momentum entre ma vie, mes implications, mes amiEs et la politique de ce temps-là. Avec des amis, au printemps 2005, nous étions allés à une simulation du conseil municipal lavallois organisé par le forum jeunesse de Laval (dont je faisais partie) Après cette scéance, nous nous étions amusés à imaginer les prochaines élections municipales (en novembre 2005) en présentant 200 candidatEs. Vu qu’il faut seulement 200 signatures pour se présenter aux élections, on pensait que chaque personne pourrait signer pour les 199 autres! C’est de là qu’est partie l’idée.

Donc, on arrive en septembre où j’obtiens facilement 200 signatures de personnes de mon cégep. Je me suis donc présentée au greffier de la ville qui recevait les candidatures. Rendue là-bas, le monsieur m‘a dit: es-tu certaine de vouloir faire cela? Ça engendre des coûts aux lavallois!! Dans ma tête, je pensais :  »Oui, oui, la démocratie, ça l’a un coût monsieur, vous avez raison. » Lui, il prenait pour Gilles Vaillancourt. Je me demande ce qu’il est devenu maintenant!

Quelques heures après être allée porter ma candidature, je me demandais: Mais comment je vais faire pour que les lavalloisEs sachent que Gilles Vaillancourt n’est plus la seule option? Je me disais que j’allais peut-être organiser une conférence de presse à un moment donné. Dans tous les cas, je ne devais pas dépenser d’argent puisque j’avais un budget 0. Finalement, un journaliste m’a contacté la journée même pour me poser des questions sur ma candidature. Le lendemain, plus de journalistes m’ont contactés. Finalement, quand je revenais de l’école, j’avais souvent des messages d’une dizaine de journalistes.

Je trouvais important de répondre aux journalistes, pour permettre aux gens de savoir qu’il y avait une alternative. Je n’ai jamais pensé gagner et je ne voulais pas être mairesse de Laval non plus. Mais, c’était primordial de militer en faveur d’un meilleur urbanisme, d’une démocratie saine ainsi que d’une meilleure protection de l’environnement.

Ta candidature a soulevé l’intérêt de tes concitoyens, puisque tu as obtenus 18% des voix, mais aussi des médias. Comment as-tu géré cette soudaine « célébrité », ne t’es-tu pas souvent sentie réduite au rôle de « candidate la plus jeune du Québec » ? Aujourd’hui quel bilan tires-tu de cette campagne ?

En fait j’ai eu 16% des voix. Ce qui équivaut à environ 12 600 personnes.

On peut donc dire que j’ai marqué l’imaginaire de mes concitoyen-nes, des médias et aussi des habitant-e-s du Québec. Cette campagne électorale n’en était pas vraiment une. Je n’ai pas serré de mains, je ne suis pas allée dans un centre de personnes âgées, j’avais 0$ de budget. Dans le fond, je participais activement à ce qui m’était proposé par les journalistes.

Sérieusement, depuis cette expérience, je pense que les médias influencent à au moins 16% les votes. Les gens ne me connaissaient pas, ils auraient pu voter pour les 4 autres candidats qui se présentaient en même temps que moi, mais les médias parlaient surtout de moi. Il était donc plus simple, si on ne voulait pas du maire sortant, de voter pour la personne qui avait le plus de visibilité.

En repensant à la campagne, je pense aussi à tous les mauvais articles de journaux qui sont sortis sur moi avec plein d’erreurs à l’intérieur. C’est un peu troublant d’avoir une conversation avec un journaliste qui, par après, écrit un article avec des phrases que je n’ai pas dites ou des informations fausses. Ça me questionne vraiment sur la véracité de ce qui sort dans les journaux ou à la télévision !

2010-05-19-10-09-10-4bf3f1066da34AngBoisvert_-Audrey en 2008 lors de la campagne provinciale
(Article sur le site du 
Courrier de Laval)

En 2008, tu rejoins Québec Solidaire pour les élections provinciales et te présentes dans Vimont, une décision commentée et vue comme une « belle prise ». Mais au-delà de cette réduction médiatique, qu’est-ce qui t’as fait rejoindre QS et où en es-tu avec ce parti aujourd’hui ?

En 2008, j’habitais encore à Laval et le parti de Québec Solidaire n’était pas un parti très connu. Avant les élections, aucun député n’avait été élu. C’est en 2008 que le parti a reçu environ 5% des votes et a eu son premier député: Amir Khadir. Dans le fond, je m’intéressai à ce parti dès sa formation, puisque c’était celui-ci qui me rejoignait le plus dans mes valeurs. Étant à Laval, je savais que je n’avais aucune chance d’être élue et c’était tant mieux parce que je ne voulais pas rester 4 ans de plus à la banlieue !

Encore aujourd’hui, QS est le parti qui est le plus prêt de moi. Avec son plan de sortie du pétrole, ses prises de décisions humanistes, féministes et pour un Québec plus égalitaire, c’est aussi dans ce sens-là que j’ai le goût d’aller pour la société. C’est sûr que le système électoral tel qu’on le connaît a fait ses preuves quant à son incapacité à résoudre la crise environnementale et à répondre aux besoins fondamentaux de tous et toutes. Québec Solidaire participe à ce système lui aussi, mais il est surtout une petite roche dans l’engrenage bien huilée.

Présentement, en 2014, 3 députés de QS ont été élus et je suis sûre que leur travail sera bénéfique pour la société en général. Pendant les élections en mars 2014 j’étais en Gaspésie et j’ai aidé la candidate de QS, Patricia Chartier, dans sa campagne. Notamment à écrire ses discours pour les débats publics. J’étais contente d’aider une telle candidate, très à gauche dans le parti. Après avoir eu les résultats des élections qui indiquaient que les libéraux étaient majoritaires, Patricia mentionnait qu’on devrait retourner dans la rue pour faire valoir nos intérêts, parce que c’est comme ça que les libéraux nous avaient habitués. J’ai aimé ce discours et oui, il faut s’organiser entre les élections !

Au delà-de cet engagement politique, ta vie en Gaspésie est aussi au plus près de tes convictions, notamment écologistes. Peux-tu nous expliquer ce qui a décidé ton départ de Laval et ce que tu construis à Bonnaventure ?

Mon départ de Laval s’est fait graduellement. C’est en 2008 que je suis partie de Laval pour déménager à Montréal dans un collectif (coop sur généreux). Ensuite, après mes études en travail social, j’ai décidé d’aller vivre en campagne puisque c’était un rêve que je chérissais depuis plusieurs années. Pour moi, la banlieue (Laval est le paroxysme de ce concept) n’est pas fait pour moi puisque c’est un endroit où l’individualisme, la culture de consommation et la non-valorisation de l’environnement dominent l’espace. J’avais le goût que mon mode de vie soit plus ancré avec mes valeurs.

La Gaspésie m’attirait particulièrement, tout le monde y passe ses vacances, pourquoi je ne passerais pas un bout de ma vie là-bas? Alors, depuis 2010, mon domicile stable (quand je ne suis pas en voyage) est situé dans le village de 3000 habitants de Bonaventure. J’ai pu créer un jardin, avoir des poules, cueillir des champignons sauvages, aller à la pêche, fabriquer une toilette compostable chez moi. Toutes ces choses et même plus encore sont possibles puisque j’habite en campagne.

À Bonaventure, j’ai travaillé comme travailleuse sociale et intervenante pour les jeunes. J’ai aussi vécue avec plusieurs personnes dont 8 à l’été 2013. J’ai toujours aimé vivre en commun et je pense que le faire peut être un acte politique. Vivre ensemble, c’est éloigner un peu plus l’individualisme de ma vie et nous rendre tous et toutes plus fort-e-s. Je ne me suis pas impliquée beaucoup en politique dans les quatre dernières années. Mais je ne suis pas restée indifférente à ce qu’il se passait autour de moi et même plus loin, à Montréal pour la grève étudiante de 2012 par exemple.

Bien que retirée des affaires publiques, tu y es brièvement revenue l’an dernier, quand Gilles Vaillancourt et une grande partie de son conseil sont tombés pour corruption. Par un slam et un entretien au Devoir tu as appelé les citoyens de Laval à se réveiller. Pourquoi as-tu ressenti le besoin de sortir ainsi de te réserve ? Et penses-tu un jour revenir en politique active ?

Lorsque Gilles Vaillancourt a été accusé de gangstérisme, j’étais très contente qu’enfin il se passe quelque chose sur ce sujet. Les lavallois-e-s en parlaient depuis plusieurs années. Jusqu’à maintenant, il n’y a pas eu de comparution, mais j’ai très hâte de voir comment cela va se passer. Avec tout l’argent qu’il s’est fait, on peut facilement croire qu’il pourra se payer les meilleurs avocats pour se défendre !

Pour moi, cette histoire d’élection municipale de 2005 est chose du passée et c’est un journaliste du Devoir qui m’a contacté pour une entrevue. Je trouve ça important de répondre aux journalistes, ça donne une voix à une autre façon de voir la politique, du moins à Laval ! Par hasard, quelques semaines avant cette entrevue, j’avais écrit un slam sur Laval, ma ville natale pour nos soirées de slam à Bonaventure. Je l’ai proposé au journaliste qui a tout de suite voulu le publier. (vous pourrez bientôt visionner un court extrait de mon slam dans le film l’Espouère de Moïse Marcoux-Chabot)

Outre cet événement médiatique anecdotique, je ne pense pas vraiment retourner en politique-électorale- active. Je vois la politique avec un œil différent où les citoyen-ne-s ont aussi du pouvoir sur les décisions des députés et ministres. Je suis politisée, active dans mes réflexions et essayant de mettre à l’avant des manières alternatives de vivre. Je pense pouvoir aider parfois le parti de Québec Solidaire puisqu’eux seuls peuvent être une roche dans l’engrenage si bien huilée du système électoral québécois. (je veux enlever la dernière phrase.)

Personnellement, je ne pense pas me représenter comme candidate pour bon nombre d’années encore. Néanmoins, je ne veux pas mettre de côté la possibilité d’être un jour candidate dans mon village avec une équipe de gens voulant vivre différemment.

Entretien réalisé
en mai-juin 2014

Pour aller plus loin :
– Slam et rencontre avec Audrey après la démission de Gilles Vaillancourt ;
Lespouère, film de Moïse Marcoux-Chabot où l’on croise la communauté où Audrey vit actuellement.

Crédits photos : Audrey Boisvert en 2013 et Courrier de Laval

FOCUS Premières Nations : Petit guide du Plan Nord, de Michel Hellman

En 2010, Michel Hellman réalisait avec Iceberg1 un premier ouvrage remarqué. Muet, le récit utilisait une technique de papier découpé pour rendre à merveille les paysages du Grand Nord canadien et rappelait avec beaucoup de sobriété un drame écologique qui avait eu lieu sur la banquise en janvier 1968 et avait été étouffé, pour le plus grand malheur des premières nations. Dans un entretien, l’auteur expliquait avoir été marqué par un voyage dans ces territoires oubliés, souvent méprisés, et avoir voulu raconter cette « dernière frontière » si méconnue du peuple québécois, alors même qu’elle fonde une partie de leur identité.

Si Iceberg a été salué comme une grande réussite, l’auteur n’y avait cependant pas tout dit. Quittant l’évocation historique, il consacre donc un nouveau livre sur cet Arctique méconnu. Ne vous attendez pourtant pas à un guide, le titre ment, et dès l’introduction l’auteur s’explique  : «Ce guide est autant un guide que le Plan Nord est un plan». Le Plan Nord, c’est un programme d’investissement du Grand Nord lancé par le Parti Libéral du Québec voici quelques années. Dénoncé pour ses aspects dévastateurs, autant écologiques que culturels, il avait plus l’air d’une nouvelle exploitation sur le dos des autochtones que d’un réel programme. Rebaptisé «Le Nord pour tous» par le nouveau gouvernement, le fond n’a guère changé et unit pour la première fois les neufs communautés Innues

Page232

Passé la préface, une fois les choses posées, Hellman laisse la place aux images. Pas forcément besoin de grands discours pour faire de la politique. Uniquement composé d’images pleine page, le guide glisse de l’une à l’autre, ne crée pas de récit mais un flux narratif évident, qui dégage aussitôt le livre du simple empilage d’illustrations.

Débutant dans la nature vierge, on avance peu à peu vers l’humain, aussi peu présent dans le livre que dans ces territoires. Présent physiquement en tous cas, car certains stigmates sont là : cicatrices sillonnant les grands espaces, des poteaux électriques préfigurent d’autres déchirures. La pollution, le peu d’intérêt porté aux peuples derrière les ressources, tout cela glisse de même, ressort et s’évoque à demi-mot.

Comme dans Iceberg, l’aspect graphique est la clef, autant pour sa force visuelle que dans ce qu’il incarne le propos. Il n’y a plus ici de papiers découpés, même si la technique reste proche, mais des sacs de plastique noirs, ces symboles des déchets que l’on retrouve un peu partout, et qui ont marqué l’auteur dans ses voyages. S’il ne les a pas ramassés au sol, ils proviennent des réserves Innues, celles qui seront précisément impactées par ce Plan, et de cette matière la plus «sale» qui soit, il fait sortir la beauté.

Page292

De son plastique évidé et collé sur papier, il fait naître la banquise, créé des arbres aux branches fascinantes et plante un décor en contraste fort où tout semble en apesanteur. Ce n’est finalement qu’à la première entrée de l’humain dans le livre qu’un lavis vient s’ajouter, rompant la pureté et l’équilibre du dessin. Le salissant finalement, comme une très limpide métaphore de projets qui n’ont que bien rarement les belles paroles qui les guident comme réel projet.

Un propos simpliste ? Oui et non, car si la question autochtone est complexe, le pillage des ressources l’est beaucoup moins. En dressant le portrait de ces terres au-delà du 49e parallèle, Hellman évoque bien sûr la destruction perpétuelle de ces territoires et de ces peuples, mais en rappelle surtout la beauté et la richesse. Sans morale lourde, il pose un regard, une contribution pour éviter d’avoir à hurler, avec la poétesse Huguette Gaulin, « Vous avez tué la beauté du monde »2.

Page322

Petit guide du Plan Nord,
de Michel Hellman
Ed. l’Oie de Cravan
Parution FR 15/03/2014
174 x 160 mm, 48 pages, 13€
9782922399776

Dans le cadre d'un partenariat avec le site Du9, cette chronique y sera bientôt publiée.
1. Publié chez Colosse, le titre est désormais téléchargeable gratuitement chez electrocomics.
2. Auteure de Lecture en vélocipède (Les Herbes Rouges, 1972), ouvrage marquant de la poésie québécoise, elle s'immola en juin 72 face au Parlement québécois afin d'alerter sur le désastre écologique. Depuis, les choses évoluent lentement dans à pays riche en ressources qui a récemment quitté le Protocole de Kyoto...

Entretien avec André Gattolin, sénateur écologiste français, secrétaire du groupe d’amitié France-Québec

Universitaire, passionné d’Europe, militant fédéraliste et compagnon de route de nombreuses associations écologistes et humanitaires, André Gattolin a été élu sénateur écologiste en 2011. Passionné par les questions internationales (il est un des rares élus à revendiquer une « action sans frontières » sur son site), très engagé sur la question tibétaine, c’est aussi un amoureux du Québec, pour des raisons tant personnelles que professionnelles. Secrétaire de la commission des affaires européennes, membre du groupe d’amitié France-Canada et secrétaire de celui consacré aux relations France-Québec, il nous éclaire sur l’utilité de ces groupes et l’importance de la diplomatie parlementaire.

tibet
Lors du Salon de la Culture tibétaine 2012

Avant de parler en détail de tes fonctions peux-tu nous expliquer d’où vient ton intérêt pour le Québec ? Je sais que tu es très investi sur la question tibétaine, si bien sûr ces deux peuples n’ont rien à voir du point de vue de l’oppression je perçois un intérêt pour les « nations sans états ».

Mon premier voyage au Québec date de 1977, en pleine période de revendication souverainiste. Avant ce voyage, j’avais une image assez distordue et un peu idyllique de la belle province, portée par mon goût pour les poètes, écrivains et musiciens québécois très en vogue en France à cette époque. Ma découverte du pays a véritablement été un choc : je ne m’attendais pas à découvrir une société aussi américanisée dans ses modes de vie et avec un tel contraste dans ses revendications politiques, culturelles et linguistiques. C’est surtout au cours des dix dernières années que j’ai appris à mieux connaître et comprendre le Québec car je m’y rends très régulièrement. Entre mes voyages à titre privé et mes déplacements es fonctions, je passe environ deux mois par an au Canada. J’ai ainsi la chance de fréquenter de nombreux intellectuels et politiques québécois et d’avoir une assez bonne expérience de la vie quotidienne au Québec. Mes interlocuteurs s’amusent souvent à me présenter comme le plus québécois des parlementaires français. C’est à ce titre notamment que j’ai eu l’occasion d’accompagner Jean-Marc Ayrault, puis Jean-Pierre Bel, le Président du Sénat, lors de leurs visites officielles au Québec l’an passé.

Concernant mon engagement en faveur du Tibet, il est très lié à mon engagement de très longue date dans les domaines de l’écologie, de la défense des droits de l’Homme et de la défense des peuples autochtones. Mon élection au Sénat en septembre 2011 m’a permis de démultiplier mon implication en faveur du Tibet, car mes contacts sont facilités par ma fonction de parlementaire. Il est vrai que la très large majorité des parlementaires français ne s’intéresse guère aux questions extérieures à l’Hexagone et lorsque c’est le cas, ils le font de manière souvent anecdotique et de façon excessivement institutionnelle. Il est en effet peu courant de voir un sénateur manifester dans la rue aux côtés des militants de la cause tibétaine, aux côtés des Amérindiens du mouvement Idle No More, aux côtés des étudiants du Printemps érable ou encore du côté des défenseurs des libertés civiles en Russie et des protecteurs de l’Arctique… Mon engagement politique national a toujours été indissociable de mes engagements transnationaux : c’est la moindre des choses dans un monde globalisé où seuls les politiques vivent encore à l’heure un peu archaïque des frontières de l’Etat-nation.

Alors, il y a évidemment une cohérence dans l’ensemble de mes engagements, y compris entre ceux qui se rapportent au Québec et ceux qui concernent le Tibet. La situation globale du Québec est évidemment assez fondamentalement différente de celle du Tibet. Dans le premier cas, il s’agit d’une province qui dispose de nombre de compétences propres dans le cadre d’un état fédéral et démocratique. S’agissant du Tibet, nous sommes dans le cas d’une nation qui voit sa culture, sa langue et ses droits fondamentaux niés par une puissance autoritaire et authentiquement impérialiste. Le dalaï-lama ne demande pas l’indépendance pour son peuple, mais l’autonomie que la constitution chinoise est censée accorder aux régions qui compose la République populaire de Chine. Pour autant, nous sommes effectivement dans le cas de deux nations sans état. Ma culture libertaire et mondialiste me conduit toujours à me méfier des états-nations au sens où on l’entend depuis le XIXe siècle. En tant qu’écologiste, j’ai toujours certaines réticences à l’égard des revendications d’indépendance, au nom de la nécessité de bâtir une structure étatique, conduisent leurs défenseurs à envisager une exploitation déraisonnable des richesses naturelles contenues dans leur sous-sol… Le cas actuel du Groenland et de la Nouvelle-Calédonie qui souhaitent financer leur indépendance par une extraction renforcée de leurs richesses minières m’inquiètent. Concernant le Québec, je souhaite et milite pour qu’on ne dévaste pas le Grand Nord au nom de la raison d’état et de l’aspiration à la souveraineté.

Les groupes d’amitiés parlementaires sont souvent décriés comme étant opaques et sans fonction réelle. C’est vrai que l’on en perçoit pas forcément bien les travaux, peux-tu nous expliquer l’utilité de ces groupes et présenter exemples d’actions ? 

Oui, les groupes parlementaires ont souvent été décriés et à juste titre car certains en faisaient un usage plus touristique que véritablement politique. Certains élus nourrissent au travers de ceux-ci des relations d’influence douteuses avec des pays aux régimes peu recommandables. Mais la situation au cours des dernières années s’est considérablement assainie. Les déplacements sont désormais très limités en nombre, les groupes d’amitiés ont vu leurs budgets singulièrement réduits et les parlementaires doivent contribuer à hauteur du quart du prix des voyages (ce qui freine les ardeurs). Ces groupes sont cependant essentiels à plusieurs titres s’ils sont correctement administrés car, d’une part, ils ouvrent un peu l’esprit de nos parlementaires sur des réalités internationales qu’ils méconnaissent souvent et, d’autre part, parce qu’ils peuvent constituer une base pour la création d’une diplomatie parlementaire telle qu’il en existe dans d’autres pays et qui permettent des échanges et des rapports diplomatiques plus directs et moins empreints de realpolitik que ceux généralement développés par les chancelleries.

Personnellement, je m’implique beaucoup dans divers groupes d’amitiés du Sénat (Canada, Québec, Tibet, Mongolie, Croatie, Italie…) car ce sont des pays que je connais bien et où j’ai tissé des liens forts bien avant de devenir sénateur. Au Québec, nous avons fait un très intéressant voyage l’an passé sur les problématiques de la foresterie et de la santé hospitalière. C’était un séjour très dense qui nous a permis de nouer des contacts étroits avec de nombreux parlementaires, experts et universitaires. Mais dans les groupes d’amitiés qui fonctionnent bien, les voyages ne sont qu’une petite partie du travail que nous conduisons. Nous accueillons beaucoup de délégations (pas seulement politiques), nous discutons et intervenons beaucoup auprès des ambassades, nous suivons les manifestations culturelles et intellectuelles organisées par ces pays en France. Personnellement, je n’ai pas de limite en matière de droit d’ingérence et je rencontre souvent à titre personnel les partis, les mouvements et les ONG des pays concernés. J’ai récemment organisé au Sénat la projection suivie d’un débat d’un excellent documentaire sur les sables bitumineux en collaboration avec les Amis de la Terre.

Il existe aussi un groupe d’amitié France–Québec à l’Assemblée nationale or il n’y a qu’une chambre parlementaire au Québec, donc un même interlocuteur. Je suppose que vous travaillez ensemble, comment faites-vous pour que les groupes ne se court-circuitent pas ?

Je suis à la fois vice-président du groupe d’amitié France-Canada, vice-président du groupe d’amitié du groupe France-Québec et membre depuis un an de l’assemblée interparlementaire franco-canadienne. Cette dernière est une assemblée instituée par un traité entre nos deux pays qui regroupent des sénateurs et des députés des deux pays. Nous recevons et auditionnons des ministres fédéraux assez régulièrement et ceux-ci répondent avec beaucoup de sérieux à nos questions.

Concernant les deux groupes France-Québec (celui du Sénat et celui de l’Assemblée nationale), nous nous connaissons bien et nous évitons de traiter en même temps des mêmes sujets. L’Assemblée nationale du Québec qui est notre interlocuteur commun veille à la bonne gestion des déplacements et évite les doublons excessifs. Il faut dire aussi qu’en France, même s’il y a deux chambres, nous nous rencontrons souvent entre députés et sénateurs et donc personne ne cherche à court-circuiter l’autre. C’est d’ailleurs avec la même intelligence que nos deux groupes d’information sur le Tibet travaillent ensemble. Derrière les rivalités d’opérette, il faut savoir que les parlementaires ont des rapports très civilisés entre eux par delà les clivages politiques. Bref, ce n’est pas la guerre civile entre nous !

La position diplomatique de la France sur la question indépendantiste est la même depuis des années : « non ingérence, non indifférence ». Pourtant en créant un groupe d’amitié France – Québec en plus du groupe France – Canada, il y une volonté de parler d’état à état, comment l’expliques-tu ? 

Oui, l’existence de ces deux groupes est un peu une bizarrerie, mais elle résulte d’une histoire très étroite et très intense entre la France et le Québec, surtout depuis une certaine déclaration du général de Gaulle. Volonté de parler d’état à état ? Je ne pense pas que cela aille jusque-là … Les traités et les conventions internationales cadrent beaucoup nos relations. J’ai souvenir en avril dernier quand j’ai accompagné Jean-Marc Ayrault lors de son voyage officiel au Canada. Je l’avais prévenu quand il a déclaré à son départ que cela ferait des vagues à Ottawa quand il a déclaré qu’il venait en voyage officiel « au Canada et au Québec ». Cela n’a pas manqué à son arrivée dans la capitale fédérale où le Premier Ministre Harper et surtout la presse anglophone l’a un peu battu froid… Mais l’incident a vite été oublié. Les officiels canadiens ou québécois sont habitués aux bourdes de nos hommes et femmes politiques!!! A quelques exceptions près, mes collègues et la plupart des ministres ont le même niveau de connaissance réelle de pays que celui que j’avais lorsque je me suis rendu la première fois au Québec (et au Canada!) il y a plus de 35 ans.

Concernant la question indépendantiste, je suis favorable à une autonomie renforcée du Québec mais je ne suis pas partisan de l’indépendance. Je suis un fédéraliste et je ne crois guère à la pleine indépendance d’un Etat de 8 millions d’habitants surtout quand il est aussi étroitement enchassé dans le continent, l’économie et la culture nord-américaine et qu’il est au cœur de la compétition mondiale. Je pense que si le Québec voulait réellement prendre ses distances avec le reste du Canada et avec les Etats-Unis, il devrait immédiatement passer un accord de coopération renforcée avec l’Union européenne. Mais je crois que nous en sommes loin…

Tu as été élu en 2011 et a donc connu la période d’élection générales de 2012, avec la grande crise étudiante qui a précédé. Était-il possible dans ces conditions de travailler avec les parlementaires québécois ?

Je suis venu une fois en voyage officiel au Québec durant le Printemps érable et 3 autres fois lors de voyages privés. J’ai vu le mouvement naître notamment dans les départements d’anthropologie et de sociologie à l’UQAM ainsi qu’à l’UDeM. J’ai pu discuter avec les étudiants et les manifestants. J’ai échangé à ce sujet avec Pauline Marois et son entourage au moment où le mouvement commençait à prendre un peu d’ampleur. Elle nous a écouté avec beaucoup d’attention, même si elle avait beaucoup de distance à ce moment-là avec les revendications étudiantes. Il faut dire qu’en France nous avons une certaine expérience des mouvements étudiants… Cela m’a beaucoup amusé lorsque la Sécurité du Québec voulait m’empêcher (« pour ma sécurité personnelle ») de rejoindre un groupe d’étudiants qui squattaient gentiment dans le froid devant l’Assemblée nationale du Québec alors que j’étais dans la rue avec les manifestants quelques jours plus tôt à Montréal ! Je devais aussi rencontrer Amir Khadir, mais un empêchement personnel ne lui a pas permis de me voir à ce moment-là. Ce n’est que tardivement et surtout à la suite de la loi spéciale 78 promulguée par le gouvernement de Jean Charest que le Parti québécois a pris des positions plus claires à l’égard du mouvement de contestation qui s’élargissait notamment en direction de son électorat traditionnel. J’ai assisté et participé à de nombreuses manifestations spontanées durant cette période et je dois dire qu’elles m’ont profondément marqué. Oui, les parlementaires québécois étaient largement dépassé par ce qu’il se passait… un peu comme mes collègues français lorsqu’il y a une importante mobilisation de la jeunesse. C’est malheureusement un classique du genre !

gatt

De manière plus personnelle, sans que ça n’engage le groupe parlementaire, on peut voir sur ton facebook public un certain nombres de soutiens à des mouvements (les grandes manifestations étudiantes de l’été 2012) ou à des partis et élus (du Parti Vert mais aussi, de manière plus surprenante, Québec Solidaire). Quand tu regardes la scène politique québécoise, quels sont les partis ou personnalités vers qui ton cœur balance ? 

Honnêtement, je ne suis pas fasciné par la scène politique québécoise, pas plus que je ne trouve la scène politique française particulièrement excitante… Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas des gens bien ici ou là, mais globalement nous sommes quand même dans une grande période désespérance où il n’y a guère de politiques qui cultivent une vision du monde en correspondance avec les grands enjeux de ce siècle débutant.

Qui porte un véritable discours sur les grands enjeux écologiques et climatiques que nous devons affronter, sur les bouleversements de la production, de la consommation et de la distribution engendrés par l’explosion des nouvelles technologies de l’information ? Qui s’interroge sur le devenir du social dans un monde globalisé et excessivement dérégulé ? Qui propose une redéfinition de la gouvernance à l’échelle de la planète et à l’échelle du local en reformulant un authentique pacte démocratique ? Personne. La tâche est rude et elle nécessite une capacité de reformulation collective dont ne disposent pas les formations politiques actuelles… Ce qui me désespère le plus, c’est la quasi-absence de réflexion géopolitique de nos dirigeants politiques. Ils gèrent au quotidien leur circonscription – leur terrain d’élection au sens propre et au sens figuré – et ils ont bien du mal à définir l’intérêt général à l’échelle d’un pays ou d’une province… Alors peut-on leur demander de penser l’intérêt général et le bien commun à l’échelle globale ou même à l’échelle d’un continent ? Si je suis écologiste, c’est parce que c’est encore le seul endroit où certains tentent de poser les bonnes questions, mais pour les réponses apportées nous sommes encore très loin du compte. Nous avons, je crois, beaucoup de bonnes idées, mais elles sont encore assez mal articulées entre elles et, surtout, il reste encore des trous béants sur des sujets très importants. Depuis deux ans et demi que je suis parlementaire et que nous disposons d’un groupe au Sénat, nous sommes forcés de prendre des positions sur tous les sujets qui émergent dans le champ politique. Avant – quand nous ne disposions pas d’un temps de parole sur tous les sujets – c’était relativement facile : nous nous concentrions sur nos thèmes fétiches, souvent sans nous poser la question de savoir si nous pouvions et voulions être en mesure de convaincre une majorité politique de nous suivre…

Oui, j’ai un certain intérêt pour Québec Solidaire qui a une vision plus ouverte du monde que d’autres partis politiques québécois. Au passage, je suis atterré quand je regarde les infos TV au Canada ou que je lis la presse québécoise, tant elle accorde peu de place aux questions internationales ! Québec Solidaire me rappelle un peu les Verts français, avec une vraie préoccupation concernant le social et l’international, en plus des questions environnementales et écologistes. Mais comme les Verts, je trouve que Québec Solidaire pêche par son absence de réflexion véritablement autonome par rapport à la gauche classique sur les questions sociales. C’est une des grandes faiblesses de l’écologie politique que de se mettre à la remorque de la pensée socialiste lorsqu’il s’agit d’appréhender les questions économiques et sociales pour construire ses positions. En France, cela s’explique par le fait que la majorité des militants et des élus écologistes ne proviennent pas des luttes environnementalistes, mais le plus souvent sont d’anciens militants d’extrême gauche engagés de longue date dans le champ du social et du sociétal. Du coup, ils tendent à coller leur ancienne matrice d’analyse sur tous ces sujets. Personnellement, les origines de mes engagements sont libertaires, profondément enracinés dans une lecture non-marxiste de la société et du rapport à la politique. C’est sans doute la raison pour laquelle je peine à trouver l’âme sœur en politique…

Pour aller plus loin :
– Le site d’André Gattolin ;
– Le site du groupe écolo au Sénat.

Crédit images : extraits du profil facebook d'André Gattolin.