Pierre Nantel est-il opportuniste ?

Pierre Nantel, député du Nouveau parti démocratique dans Longueuil–Saint-Hubert depuis 2011, vient d’annoncer son ralliement au Parti vert du Canada, quelques jours après avoir été exclu de son parti d’origine suite à l’ébruitement de ces discussions. Les accusations sont arrivées assez vite : Pierre Nantel a toujours été franc-tireur, il roule pour lui, il va au plus offrant, car il risquait d’être battu et que les verts sont en hausse sondagière alors que le NPD est en décrue. De fait, les projections de divers instituts synthétisées par 338Canada indiquent le NPD troisième, largement distancé par le Bloc et les libéraux… Mais les verts sont données cinquièmes ! Certes ces synthèses de scores nationaux projetées sur les circonscriptions ont une forte marge d’erreur, mais enfin, on peut parler d’un pari pour le moins risqué.

Sur le plan des convictions oui Nantel est un franc tireur. Il s’est démarquéde son parti en expliquant que les signes religieux trop voyants de son chef causeraient des problèmes avec l’électorat québécois et a pris position pour une déclaration de revenus unique gérée au Québec plutôt que d’en faire une fédérale et une provinciale. Cela allait contre la vision du NPD, défendant les positions des syndicats, mais il paraît là aussi difficile d’en faire un point de clivage suffisant.

Par ailleurs ces deux distinctions auraient amené plus logiquement Nantel vers le Bloc québécois. Ce d’autant que le parti lui a tendu la main en début d’année, assez fort pour que les choses fuitent, et le député n’avait pas fermé la porte. Le parti indépendantiste étant bien mieux positionné pour gagner l’élection dans cette circonscription, un pur opportuniste aurait logiquement fait ce choix plutôt que le pari risqué du parti vert. Certes, dans les dernières projections les écologistes quadruplent leur score de 2015, mais ça ne les fait que passer à un peu moins de 10 %, pas vraiment un fief. Pour certains, c’est parce qu’il s’est fait finalement fermer la porte au Bloc que Nantel serait aller voir les verts, pourquoi pas, mais cela reste curieux alors que le NPD (toujours mieux placé que les verts) lui accordait encore l’investiture.

On peut aussi porter crédit à M. Nantel de plusieurs engagements forts liés à l’écologie : il a porté très fortement le dossier de l’électrification des transports (non nucléaires au Québec), avait écrit en décembre 2018 une lettre ouverte à tous les chefs de partis pour s’engager dans un « un front commun pour sauver notre climat », en s’engageant sur des objectifs massifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il a aussi été le premier député à avoir ajouté le respect des traités avec les autochtones à son serment, un acte symbolique important, l’intérêt sincère pour la question des premières nations est cependant commun au NPD et aux Verts.

Juger sur la sincérité du ralliement de M. Nantel au parti vert est donc bien difficile, hormis sans doute pour lui. À tout le moins ses actions passées comme les conditions de son départ rendent ce ralliement moins absurde que celui de José Nuñez-Melo en 2015. Le député NPD de Laval avait lui aussi été exclu du NPD, parce qu’il refusait d’avoir des adversaires dans une investiture, adversaires soutenues par beaucoup au parti car la présence de Nuñez-Melo avait été pour le moins fantomatique durant son mandat1. Il avait alors rejoint le Parti vert, sans être pour autant le premier député vert reconnu, la Chambre étant déjà dissoute2. Son ralliement était clairement celui d’un homme voulant sauver son siège et les électeurs ne s’y étaient pas trompé : il avait obtenu 2,36 %, résultat assez négativement exceptionnel pour un sortant.

Pierre Nantel n’est clairement pas dans la même situation. L’avenir seul saura nous dire s’il restera fidèle au parti vert ou si ça n’est qu’une passade, plus ou moins sincère. Mais en tous les cas son ralliement n’est pas incohérent, même s’il est certain que la forte tête qu’il est saura s’en distinguer par moment – comme il l’a fait au NPD ou l’aurait fait s’il avait rejoint le Bloc –, en suivant ses convictions. Il y a plus déshonorant.

1 Il n’avait pas pris la parole en Chambre avant plus d’un an et demi de mandat et ne siégeait dans aucune commission à part… celle de la bibliothèque du Parlement, qui a une fonction purement symbolique !

2 Ce n’est pas le cas de M. Nantel, qui aurait put être le premier député vert du Québec, mais il a fait le choix de rester siéger comme indépendant jusqu’à la dissolution.

Crédit Photo : Facebook de Pierre Nantel / Daniel Green, Elizabeth May et Pierre Nantel le 20 août 2019.

Entretien avec Alexandre Leduc : un an de mandat

Dès le soir de sa défaite en 2014, Alexandre Leduc annonçait qu’il souhaitait reporter les couleurs de Québec solidaire (QS) dans Hochelaga-Maisonneuve (HM), et revenait sur sa campagne pour notre site. En octobre 2018, il a bien été candidat et a fait partie de cette petite vague de néo-députés solidaires, avec dans son cas une très confortable avance : plus de 7000 voix sur la députée péquiste sortante. Retour une première année de session parlementaire.

Il y a un an, les résultats ont été très bon pour Québec solidaire, empochant des circonscriptions espérées – et mêmes quelques inespérées -, réussissant notamment à percer hors de Montréal. Quelle a été ta perception de ces résultats dans ton comté (où tu obtiens 50 % des suffrages et donc une majorité d’électeurs, chose rare dans le système à un tour) et dans la province ? Et quelle a été ta première impression une fois réuni en caucus ou dans le salon bleu, enfin élu après trois candidatures  ?
Au déclenchement de la campagne, QS avait de grandes ambitions et j’étais assez confiant à propos de chance de l’emporter dans HM, mais dans l’absolu rien n’est joué et tout peut s’effondrer rapidement. Cependant, à mesure que la campagne avançait, quelques indices confirmaient qu’on se dirigeait vers une victoire dans mon quartier. Tout d’abord, nous avions un nombre record de personnes qui installaient une pancarte sur leur balcon. Il y en avait au moins une dans chaque rue du quartier, c’était impressionnant. Ensuite, j’obtenais beaucoup plus de succès auprès des indécis à qui je parlais que les élections précédentes. Finalement, la bourde monumentale du chef péquiste lors du deuxième débat des chefs a scellé la chose dans HM. Le résultat a malgré tout été passablement plus fort que nous l’avions projeté. On s’attendait à gagner avec des appuis alentour de 40%. Le 50,05% fût donc une agréable surprise et aussi une sérieuse obligation d’être à a hauteur de la situation.
Nous avons tenu notre premier caucus 4 jours après le vote. C’était un moment très fébrile, car nous étions tous encore sur un nuage. De plus, c’était des occasions de premières rencontres pour certains et certaines d’entre nous. En effet, j’avais rencontré qu’une seule fois Émilise Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda-Témiscamingue) et je n’avais jamais rencontré Christine Labrie (Sherbrooke). J’étais un ami de Sol Zanetti (Jean-Lesage) et Catherine Dorion (Taschereau), mais je ne les avais pas du tout vus de la campagne. Je me demandais donc ce qu’il et elle venaient de vivre comme expérience électorale dans la ville de Québec, réputée très conservatrice.
Le moment le plus émotif était le tour de table. Chaque nouveau député se présentait en disant son nom suivi de son nouveau statut (i.e. bonjour je suis Alexandre Leduc, député de Hochelaga-Maisonneuve). C’était donc des cris de joie à chaque présentation d’un nouveau député.
Le caucus a surtout servi à discuter des prochaines étapes, de conseils pour mener à bien les embauches dans les différents bureaux de circonscription, commencer à réfléchir à nos intérêts pour le partage des dossiers et discuter de la cérémonie d’assermentation.
J’avais déjà eu affaire au parlement dans le passé dans des simulations parlementaires et comme conseiller du président de mon syndicat dans le cadre d’auditions de commissions parlementaires. J’étais donc assez familier avec l’endroit. Cependant, lorsque tu ouvres la porte de ton bureau pour la première fois et lorsque tu vois ton nom sur ton pupitre au salon bleu, il y a bien sûr une charge émotive qui accompagne le moment. Le sens des responsabilités t’envahit et tu espères être à la hauteur du défi.

Tu es assez logiquement (avant son élection, M. Leduc était conseiller syndical sur les questions de droit du travail) membre de la commission de l’économie et du travail. François Legault se vante d’être un manager, un chef d’entreprise, l’économie est censée être son pré-carré. Quel bilan tires-tu du début de mandat sur cette question précise ?
Le dossier du travail est malheureusement peu couvert en dehors des grands conflits de travail. À preuve, des deux grands dossiers Travail de la précédente session parlementaire – lock-out d’ABI à Bécancour et réforme de la loi sur l’équité salariale (LÉS) – les médias n’ont couvert que le premier.
Dans les deux scénarios, le gouvernement Legault a adopté une attitude hostile au mouvement syndical. Il a pris parti pour l’entreprise ABI (bien qu’elle bénéficiait déjà d’un rapport de force inégale en raison d’une ridicule clause de force majeure dans son contrat d’électricité avec la société d’État Hydro-Québec). Son implication dans le dossier fût très négative et a permis à l’employeur de jouer l’horloge jusqu’à l’épuisement des troupes. Paradoxalement, la CAQ avait obtenu un fort appui dans la région où est située l’usine. Parions que cet appui ne sera pas le même en 2022.
La réforme de la LÉS était une réponse à un jugement de la Cour suprême qui obligeait le gouvernement à réécrire sa loi, car elle était discriminatoire. La nouvelle mouture comportait encore des défauts, mais réglait les principaux irritants. Le scandale est qu’elle ne s’applique pas aux anciennes plaintes déposées avant la réforme. Les anciennes plaintes seront traitées par l’ancienne loi… que la Cour vient de juger discriminatoire. Il y aura donc une nouvelle ronde judiciaire menée par le mouvement syndical pour démontrer que la nouvelle LÉS ne répond pas adéquatement au jugement.
Dans les deux scénarios, le gouvernement agit en gestionnaire qui prend fait et partie pour le capital et ses propres intérêts comme État-employeur plutôt que de penser au rehaussement des conditions de vie des travailleurs et travailleuses du Québec.
Nous attendons une importante réforme en santé et sécurité au travail et une autre sur les services essentiels. Je ne m’attends malheureusement pas à un changement d’attitude de la part du gouvernement.

Le fait d’avoir un groupe reconnu donne des moyens à QS, mais vous n’êtes malgré tout que dix. As-tu l’impression de réellement pouvoir exercer ton travail de député face à une majorité caquiste écrasante ? Le député a t-il un réel pouvoir ? Si oui peux-tu donner un ou deux exemples d’impact concret des députés d’opposition ?
Passant de 3 à 10 députés, on peut maintenant à peu près tout couvrir et être présent partout où sont normalement les autres partis. C’est tout un changement par rapport à la précédente dynamique où les trois élus devaient constamment faire des choix déchirants concernant les interventions médiatiques à préparer, les commissions parlementaires à couvrir, les invitations à accepter ou refuser, etc.
Ce n’est donc pas moins de travail que lorsque nous étions trois, mais une meilleure présence dans l’ensemble des dossiers.
Un député d’opposition n’a pas plus ou moins de pouvoir qu’un député du parti au pouvoir qui n’est pas ministre. Un député d’arrière-ban peut parfois avoir plus de problèmes qu’un bon député d’opposition pour avoir accès à un ministre. Tout dépend de sa capacité à mener ses dossiers, sa crédibilité et les relations tissées avec les ministres.
Localement mon équipe et moi avons mené quelques dossiers où j’ai participé à obtenir des subventions pour des groupes, débloquer un important dossier d’agrandissement de garderie et réussi à mettre la main (via une demande d’accès à l’information) sur les plans autoroutiers du ministère des Transports sur un secteur industriel en développement.
Ce sont de petites victoires qui s’ajoutent aux dizaines d’autres petites victoires sur des dossiers de citoyens et citoyennes qui viennent cogner à la porte du bureau de circonscription. Là-dessus, tout le crédit revient à mes collègues attachées politiques qui font tout ce travail essentiel.

Alexndre Leduc au lancement de sa campagne en 2018 /
AndréLegault – Wikicommons

Pourrais-tu me donner un exemple de chose qui t’a surpris lors de cette session, en négatif et en positif ?
J’ai été surpris négativement par le peu de décorum au salon bleu. C’est pire que ce qu’on perçoit à la télévision où le téléspectateur entend parfois un brouhaha. Quand tu es assis au centre de l’action, tu vois ce que la caméra ne voit pas et tu entends ce que le micro n’entend pas. Ce n’est pas joli. Les élus du PLQ sont de loin les plus indisciplinés. Certains ministres de la CAQ (surtout des hommes, bien entendu) étaient un peu trop contents d’avoir gagné en début de législature. Je trouve que ces comportements ne sont pas à la hauteur de notre fonction.
D’un autre côté, en dehors des moments plus « spectacle » de la politique (période des questions, commissions, entrevues, etc.) il règne une surprenante convivialité à l’Assemblée, en particulier entre les élus. Ça se tutoie très rapidement, les ministres sont très accessibles et l’ambiance est bon-enfant. Le contraste entre ces moments et ceux relevant du spectacle est donc total. Cela fait en sorte que deux députés sont capables de s’engueuler pendant la période de questions, mais de régler des dossiers 15 minutes après dans la file d’attente de la cafétéria.

La majorité du travail parlementaire est en fait assez mal connu, quelle action discrète – pas forcément dépendant uniquement de toi, mais qui te semble essentielle – voudrais-tu faire mieux connaître du grand public ?
J’éprouve beaucoup de frustration devant ma difficulté certaine à faire parler de mes dossiers locaux dans les médias. Mes collègues qui sont hors Montréal ont tous des médias régionaux qui s’intéresse de près à leurs travaux. À Montréal, il n’y a que des médias nationaux et il est difficile d’attirer l’attention sur un quartier en particulier. Je crains que cela donne l’impression aux résidents de ma circonscription que je ne fais pas grand-chose pour le quartier. Il y avait un média local citoyen pendant quelques années dans le quartier, mais il a fermé faute d’implication. Nous cherchons des solutions, mais ce n’est pas simple.
Nous faisons face à un important phénomène de gentrification (embourgeoisement) dans HM et cela a des conséquences insoupçonnées, notamment sur le financement des écoles et plus spécifiquement sur le financement de la « mesure alimentaire », un programme de collation gratuite et de dîner à 1$ pour les enfants de familles à faible revenu dans les écoles du quartier. La disparition de ces programmes ne touche pas seulement mon quartier donc il a été difficile d’attirer l’attention des journalistes sur le sujet. On a donc tourné notre propre reportage qu’on a mis en ligne [voir https://www.facebook.com/LeducAlexandreQS/videos/418350962341311].

Déjà en 2014 tu indiquais ne pas être membre de parti fédéral ni vouloir te positionner publiquement au nom de la séparation entre les échelons électoraux. Mais sans appeler à voter pour tel ou tel parti, quelle est ton analyse du mandat Trudeau et des dynamiques en cours (notamment l’arrivée de pouvoirs conservateurs dans tous le Canada) ?
En effet, au Québec il n’y a pas de liens organiques entre les partis fédéraux, provinciaux et les rares partis municipaux. Québec solidaire a donc pris position il y a quelques mois pour affirmer son désir de ne pas soutenir un parti ou un autre dans la course fédérale. De fait, aucun parti fédéral ne nous rejoint sur l’ensemble de nos positions. De toute manière, l’ère des consignes de vote est révolue, car même les centrales syndicales ne procèdent plus ainsi.
Je connais certains membres de QS impliqués au Bloc, d’autres au NPD ou encore au Parti vert. Je leur souhaite bonne campagne!

Les « mandats tremplin » et le respect des électeurs

Gérald Deltell et Olivier Chow (wikicommons)

Le cumul des mandats est une vieille tradition française, souvent incomprise à l’extérieur. Ce système, qui permet à une personne de s’accaparer de nombreux postes, a été timidement régulé au fil des ans : la dernière fois sous François Hollande, qui a interdit d’être parlementaire (député, sénateur ou député européen) et maire d’une commune. Cette loi s’est appliquée en juin 2017 pour la première fois mais permet toujours d’être parlementaire et conseiller municipal ou, plus grave, parlementaire et conseiller départemental ou régional, deux postes qui sont loin d’être bénévoles.

J’ai souvent envié le Canada pour son intolérance absolue au cumul, les seules possibilités étant d’être maire et de siéger dans des regroupement de municipalité ou des MRC, où les représentants sont forcément des élus. On notera qu’en France le même système existe avec, avant la réforme, de très nombreux maires, députés et président d’agglomération, tout en même temps.

Mais plus que le non-cumul strict, qui existe dans la plupart des démocraties occidentales, c’est au Canada que j’ai découvert une pratique particulièrement innovante visant à démissionner de son poste quand on se présente à un autre mandat. C’est ce qu’avait fait Gérard Deltell en 2015, démissionnant de l’assemblée nationale du Québec pour se présenter à la Chambre des communes (assemblée fédérale) ou la députée fédérale Olivia Chow qui démissionna en 2014 pour se présenter aux municipales de Toronto. Si le premier a conquis son nouveau siège, la seconde a perdu et s’est retrouvée sans mandat.

J’admire cette règle non-officielle mais récurrente, qui semble répondre à un impératif simple : si vous êtes élu à un mandat c’est qu’il vous convient, si vous en courez un autre c’est que celui que vous occupez ne vous plaît plus et vous ne pouvez sérieusement vous y consacrer en menant une autre campagne.

En France, les mandats tremplin sont récurrents, un élu se présente souvent au maximum à d’autres mandats plus « importants », ce qui en dit long sur la manière dont ils voient celui qu’ils occupent. Quelqu’un qui est adjoint au maire, ou conseiller régional, affirme ainsi sa légitimité à devenir parlementaire. Il ira ensuite chercher ce nouveau mandat en conservant celui qu’il occupe déjà, où il sera forcément moins présent. En cas de défaite, il pourra rester tranquillement dans son ancien poste, et aura occupé l’espace en empêchant le renouvellement.

J’ai tristement constaté il y a quelques mois que cette spécificité canadienne n’était en fait qu’un usage et nullement une règle. Pour les élections provinciales Québécoises d’octobre, plusieurs candidatures vedettes sont déjà élues par ailleurs : Chantal Rouleau, mairesse de l’arrondissement de Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles depuis moins d’un an, s’est lancée pour la députation au nom de la CAQ, quand le conseiller municipal de Montréal Frantz Benjamin a été annonce pour les libéraux. Aucun n’a indiqué vouloir quitter son mandat, même si la presse relevait que les électeurs goûtaient peu ces sauts.

Parmi les réformes possibles dans nos deux pays, contractualiser cette idée permettrait une pratique plus saine de la politique. C’est n’est bien sur pas la seule, ni l’alpha et l’oméga, mais serait une indication claire de ce qu’exercer un mandat veut dire, et un simple respect des électeurs.

La multiplication des partis

Lundi 30 juillet, un article de La Presse Canadienne largement repris a expliqué que le Directeur général des élections du Québec avait enregistré 20 partis officiellement pour l’élection, et qu’un 21ème pourrait même être habilité d’ici la clôture le 15 septembre. En tous les cas c’est déjà un record : « Jamais, dans l’histoire récente du Québec, on n’a atteint la vingtaine de partis » écrit La Presse Canadienne. Et de rappeler qu’en 2012 les 18 partis accrédités battaient déjà l’ancien maximum.

Hasard de calendrier, cette annonce sort en même temps qu’un site français lancé par Tris Acatrinei, du Projet Arcadie, visant à recenser tous les partis politiques français – actuels mais aussi passés – et leur date de création, adresse, dirigeant etc. Ce site vient de naître, il offre une base de donnée utile et prendra sans doute en ampleur au cours des ans. Là où le rapport avec le Québec est intéressant est qu’il recense… 541 partis en activités.

Pourquoi une telle distorsion entre le Québec et la France ? Il y a bien sur plusieurs biais :

  • La population, la France a plus de huit fois plus d’habitants (est 8 fois plus importante), avoir plus de partis peut sembler logique ;

  • En France des partis servent à tous les échelons (municipal, régional, national, européen, etc.) mais il existe aussi des partis strictement municipaux ou régionaux, alors qu’au Canada chaque échelon (fédéral, provincial, municipal) est distinct et à ses partis. Il faudrait donc ne comparer les partis provinciaux qu’au nombre de partis se  présentant aux élections législatives, par exemple – ce qui n’exclurait pas des partis locaux, comme les autonomistes Bretons où les indépendantistes Kanaks ;

  • Le nombre d’échelons territorial est plus important en France qu’au Canada, on y retrouve pas moins de 35300 communes, plus des départements, des régions, l’État (en deux chambres) et le parlement européen.

Cependant, s’il faudrait réduire un peu le chiffre de 541 partis français pour avoir une comparaison parfaite, cette liste présente bien les partis reconnus comme tels auprès des institutions compétentes, et ne prend pas en compte les multiples associations politiques, par exemple créés pour porter une candidature aux municipales. Cette reconnaissance comme parti entend des démarches particulières rigoureuses et permet des déductions fiscales plus importantes. Elle permet aussi d’être déclaré pour avoir droit au financement public.

La création de ces multiples partis est une astuce souvent utilisée pour permettre de fragmenter ses dons, par exemple si le parti d’un élu que l’on aime bien ne nous plaît pas, ce dernier peut créer un parti pour recevoir des dons qu’il pourra utiliser de manière plus performante. On l’a vu lors de la présidentielle où l’argent ramassé lors de la primaire de droite est allé à Force Républicaine, le parti de François Fillon, et pas au parti organisateur. S’ils ont finalement trouvé un accord financier le micro-parti permettait de « capter » des sommes et d’avoir une sécurité financière en ne dépendant pas d’une structure moins personnelle.

L’inexistence de ces multiples structures au Québec tient sans doute tant à une histoire politique différente – avec un poids historique du bipartisme anglo-saxon, même s’il est aujourd’hui plutôt un tri voir quadripartisme dans la plupart des parlements du Canada – qu’à des règles aussi bien de constitution que d’existence bien plus strictes.

Pour ce qui est des dons, la France autorise 7500 € de dons par ans et par personne (avec une limite au double par foyer), auquel peuvent s’ajouter 4600 € de dons à un candidat ou pour une élection précise, le tout déductible à 66 % des impôts (jusqu’à 20% du total). Si les dons sont vérifiés, les noms sont indisponibles au public. Au Québec un électeur peut donner au maximum 100 $ par parti par an, somme qu’il peut doubler en cas d’élection. Un site dédié permet de voir le nom de chaque donateur associé à sa la ville, son code postal et au détail des sommes versées sur plusieurs années.  Les partis ne peuvent a priori pas se financer entre eux, comme c’est le cas en France, ce qui évite des jeux de transit entre différente caisses (la tradition de l’accord politique avec plusieurs logos sur une affiche est aussi inexistante), on note enfin que les sommes sont bien plus modestes, suite à un changement de loi en 2014, d’autant que cette modification a aussi supprimé le crédit d’impôt pour les dons.

Au-delà des dons, qui sont certes une ressource (et la seule de la grande majorité des 541 partis français puisque seuls 16 d’entre eux ont accès au financement public), la manière de créer un parti diffère aussi. En France, il suffit de créer une  association loi 1901 à caractère politique. Pour cela il suffit de deux personnes, d’une adresse et de régler le coût de la publication au Journal officiel, puis de créer une deuxième association loi 1901 dédiée, elle, au financement du parti. Une fois cela fait, l’agrément arrive simplement et il est très facile de jouer sur les micro-partis pour amasser des sommes et les transvaser entre partis (une pratique que je ne crois pas autorisée au Québec, sauf en cas de fusion stricte).

Au Québec, les choses sont plus radicales : un parti peut au minimum avoir cent adhérents, que le DGEQ va contacter un par un pour vérifier leur volonté d’appartenance (quitte à demander une liste complémentaire), déposer 500 $ de caution (remboursée après le premier rapport financier valide) et présenter des candidats aux élections. Après plusieurs années sans présenter de candidats aux élections générales ou partielles, les partis sont radiés d’office. Ainsi, les partis ont une « obligation d’existence » et ne peuvent bien longtemps rester des coquilles vides servant à épargner pour des jours meilleurs ou au possible lancement d’une carrière personnelle.

Dans la plupart des articles, on note une analyse expliquant que des partis plus nombreux ne sont pas forcément le signe d’une meilleure démocratie, les participations aux élections baissant en parallèle. S’il me semble un peu spécieux de faire une corrélation directe entre ces éléments, il semble cependant que le système québécois et ses 21 partis gagne le combat de la transparence et de la clarté sur un système français où tout semble fait pour pouvoir réussir à bidouiller malgré des lois de régulations de plus en plus fermes (et c’est heureux) depuis les années quatre-vingt.

Entretien avec Anne Min-Thu Quach

Anne Min-Thu Quach est une des nombreuses députées élues lors de la « vague orange » de 2011, mais aussi, et c’est plus rare, une députée néodémocrate réélue en 2015. Si elle n’est pas forcément la plus connue du caucus, j’ai souvent apprécié ses prises de position, l’élue s’engageant sur des sujets qui me sont chers : après avoir été porte-parole du caucus sur les questions de santé, puis d’environnement elle est porte-parole du NPD pour la jeunesse depuis novembre 2015. Merci encore à elle et à ses assistants pour l’accueil et la mise en place très rapide (autour de 24h !) de ce rendez-vous.

Anne Minh-Thu Quach à la Chambre des communes en mars 2018.

Avant de débuter sur vos combats propres j’aimerai savoir comment vous vivez l’environnement actuel, comment luttez-vous face à un premier ministre comme Trudeau ?

On continue de se position comme le vrai parti progressiste au Canada. On est le parti qui peut défier le gouvernement sur ses discours à saveur progressiste mais qui sont dans les faits éloignés des revendications des groupes de femmes, des groupes environnementaux, de la société civile, qui ne sont pas satisfaits. Pour cela le sens de mon travail est toujours le même, et ce ne sont pas les conservateurs qui vont se positionner sur ces enjeux en défendant un point de vue progressiste.

Sur les sujets progressistes justement on a un gouvernement qui se dit ouvertement féministe, quelle est votre analyse de ça ?

Pour l’instant c’est dans les paroles, dans le dernier budget je crois qu’on recensait presque 700 fois le mot « équité des genres » mais dans les faits on en est pas là du tout. Oui il y a eu quelques avancées comme le cabinet paritaire ou la loi permettant l’octroi de congés payés par l’employeur pour les femmes victimes de violences conjugales, pour qu’elles puisse se remettre sur pied et trouver une nouvelle place. C’est un enjeu sur lequel on s’en positionné et qu’on défendait, on est content que ça ait été fait.

Mais sur d’autres questions comme l’équité salariale, cela fait presque trois ans que les libéraux disent qu’ils vont proposer une loi proactive là dessus. Dans leur dernier budget ils ont écrit qu’ils allaient faire quelque chose dessus, mais il n’y a toujours pas de projet de loi déposé, et encore moins d’engagement concrets ou de budget attribué, on est donc bien encore que dans les paroles.

Sur d’autres sujets comme le développement de refuges et de logements sociaux pour le femme ou le développement de système de garde universels, comme il y a au Québec mais élargit à tout le Canada, ils refusent d’avancer. Si on veut que les femmes travaillent au même titre que les hommes mais qu’elles n’ont pas la possibilité d’inscrire leurs enfants à un service de garde, alors qu’on sait que cela pousse souvent les femmes à rester à la maison, c’est contradictoire. Beaucoup de choses comme ça, qui remontent directement du terrain, sont inexistantes dans les projets de lois.

Par curiosité, quels sont les équilibres femmes/hommes à la Chambre ? Est-ce qu’il y a des règles de parités sur les candidatures comme en France ou pas du tout ?

On n’est que 26 % de femmes, au Nouveau parti démocratique on est le parti qui s’en approche le plus. On est 42 % je crois, pas juste de candidate mais d’élues, et notre leader Ruth-Ellen Brosseau a demandé à plusieurs reprises au Premier Ministre Trudeau ce qu’il entendait faire au niveau de la législation pour qu’aux prochaines élections il y ait des amélioration mais jusqu’ici elle n’a pas eu de réponses. Et ce ne sera pas réglé avec les listes à la proportionnelle puisque la réforme à la proportionnelle a été abandonnée.

Pour en venir à vos portefeuilles, quelles sont les priorités du NPD sur les questions de droit des femmes et de jeunesse ?

Sur les l’égalité femmes-hommes c’est vraiment l’équité salariale que l’on défend sans cesse. Cela fait juste quatorze ans qu’un rapport est sorti sur cette question, toutes les études et consultations ont été mené, il est chiffré, les recommandations sont là. On ne devrait pas attendre pour en faire une loi mais là ils nous disent qu’ils sont encore en train de consulter alors qu’il y a tout qui est là, et notamment les travaux expliquant combien ce serait positif pour tous. Aujourd’hui une femme touche environ 80 % de ce que touche un homme au Canada, au même poste, c’est pas mal en retard pour un pays du G7 et un gouvernement qui se proclame féministe. Et on lie ça beaucoup avec le programme de garde universel, qui est lié à la jeunesse aussi finalement.

Pour la jeunesse on s’est engagé à réduire très fortement le fardeau des étudiants au niveau des prêt étudiants. En congrès on s’est prononcé très récemment en faveur de la gratuité scolaire pour le niveau collégial et universitaire. C’est une mesure très forte, qui serait un soulagement pour beaucoup de jeunes et aussi une vraie assurance d’égalité.

C’est en effet très important mais y-a-t-il d’autres mesures pour ceux qui ne sont pas étudiants, en primaire ou par exemple pour ceux qui ne peuvent pas faire d’études, qui peinent à s’insérer dans l’emploi ?

On parle beaucoup de précarité de l’emploi présentement, de jeunes qui sont travailleurs autonomes pour des plateformes, ce qui paraît leur seul débouché. On veut développer un plan très fort sur la formation pour leur permettre d’avoir d’autres solutions qui les rendent moins dépendants mais quand j’ai dit ça aux libéraux le ministre des finances m’a dit « get used to it », « il va falloir s’y habituer » donc ils n’ont clairement pas envie de s’y attaquer.

Sinon, là je viens d’une conférence de presse sur le sujet de l’exploitation des jeunes mineures. En 2015 la Chambre des communes a adopté à l’unanimité un projet de loi qui s’appelle C-452 qui fait en sorte que les proxénètes et ceux qui font de la traite et de l’exploitation, souvent à 50 % sexuelle, des femmes, en majorité de jeunes femmes, puissent avoir des sanctions cumulatives et qu’il y ait un renforcement du fardeau de la preuve. On ne peut plus voir des jeunes de quatorze-quinze ans à témoigner en cours pour prouver qu’elles sont des victimes par exemple. Un troisième point ajoutait la traite de personnes à la liste des infractions permettant la confiscation des produits de la criminalité.

On avait adopté ce texte, les libéraux ont voté pour, il a eu la sanction royale mais les libéraux disent qu’ils ont soudainement vu un problème constitutionnel avec les peines cumulatives. Ils ont déposé à projet de loi à eux, qui s’appelle C-38, qu’ils n’ont pas encore mis au débat. Cela fait un an qu’ils en parlent mais pendant ce temps les victimes, elles, attendent toujours, et il n’y a aucun plan de financement pour aider celles qui sont touchées par cette criminalité. C’est une autre aberration qui touche beaucoup les jeunes.

On s’est aussi impliqué sur le projet de loi sur la Marijuana. Le gouvernement considère que la légalisation va tuer le marché noir, et on est d’accord là dessus, mais on pense qu’il faut investir beaucoup plus en prévention sinon les jeunes vont se dire « oh c’est légal, c’est donc que ce n’est pas dangereux ». Au départ les libéraux partaient sur du dix millions sur cinq ans, soit deux millions par années et pas juste pour la Marijuana mais pour toutes les drogues ! Alors qu’on traverse en ce moment une très grave crise sur les opioides. Là on est monté à sept millions, mais par comparaison on cite souvent le Colorado qui investi par années 40 millions pour la prévention. Les policiers, les enseignants, demandent de la formation aussi, et ce qu’on entend c’est surtout le gain financier pour l’état, mais il faut aussi faire de la sensibilisation. Et il y a beaucoup de problématiques auxquelles les libéraux n’ont pas pensés, ils sont encore en train de consulter des experts pour savoir quelle quantité de THC va être autorisées dans quels produits, par exemple pour ce qui risque d’affecter les facultés de conduites.

Sur un autre sujet, j’ai regardé votre activité parlementaire et j’ai vu un projet de loi qui m’intéresse particulièrement en tant qu’écologiste, sans doute lié à vos anciens portefeuilles, sur l’alimentation locale.

Oui, je l’ai déposé lors de la précédente législature, j’étais porte-parole en santé, mais il n’a toujours pas été débattu en Chambre, à l’époque les conservateurs s’y étaient opposé. Il s’agit de demander au ministre de l’agriculture au fédéral de se réunir avec les ministres provinciaux de l’agriculture, d’abord pour définir ce qu’est le « local » : pour certains c’est provincial, pour d’autres à 100km à la ronde, pour d’autres c’est le pays – c’est qui peut faire très éloigné mais toujours moins que si ça vient de Chine. Ensuite, le projet demande de faire en sorte qu’il y ai une quantité minimale d’achats de produits locaux dans les 48000 établissements fédéraux, selon la saison évidemment.

On sait que si individuellement on fait un achat de 5 $ d’aliments locaux à l’épicerie ça aide grandement les agriculteurs, donc si l’état fédéral ça engage ça pourrait tout changer. Ça peut leur permettre simplement de survivre, dans les douze dernières années on a perdu près de 10000 fermes familiales. Au Canada un emploi sur huit est rattaché à l’agroalimentaire, c’est beaucoup d’emploi, en région surtout, et pour les jeunes et la relève agricole c’est essentiel de conserver des fermes familiales.

Quand j’ai déposé ce projet de loi, je n’étais pas rattaché à l’agriculture, mais régulièrement dans les comités les gens me disaient que les personnes âgées et les jeunes n’ont pas accès aux fruits et légumes parce que ça coûte trop cher. En défendant les agriculteurs locaux et leurs conditions de travail cela permettait de contrebalancer ça aussi.

C’est un projet déposé il y a longtemps mais c’est toujours un actuel projet, malheureusement il n’est pas à l’ordre du jour. Pourtant en 2015 quand les conservateurs l’ont refusé les libéraux s’étaient prononcés en faveur du projet de loi, maintenant qu’ils sont au pouvoir ils semblent avoir oublié. J’essaie de le faire revenir dans le projet sur l’alimentation mais à ce qu’ils m’ont dit, ils ne comptent pas l’intégrer.

Sur le site de la chambre des communes je me suis aussi intéressés à vos commissions mais je n’en ai vu aucune dont vous étiez membre, c’est normal ?

Oui, c’est la réalité en ce moment, j’ai eu une petite fille qui a trois ans et je suis dans le bon parti, qui a été très accommodant avec ça. C’est connecté aux autres enjeux au fond. Le NPD m’a laissé réintégrer mes travaux au fur et à mesure, je devais voter aux votes prévisibles mais était dispensés des votes imprévisibles qui sont parfois par surprise. Lors de mes « tours de garde », ces moments dans le caucus où l’on se partage des temps où on doit être cinq heure dans la chambre, ont été pris par d’autres collègues, vraiment c’était super généreux mais c’était d’entrée de jeu proposé. Je ne sais pas si c’est comme ça dans les autres partis.

On s’est battu aussi pour avoir une salle spéciale – il y a une garderie mais il faut que les enfants y soient cinq jours semaines ce qui est impossible avec nos agendas, et c’est à partir de 18 mois –, jusqu’ici nous n’avions pas de salles spécifiques. Christine Moore, une collègue néodémocrate qui a eu deux enfants dans les deux dernières législatures, a fait un accord avec la Chambre des communes pour une nounou privée, qu’elle paie avec ses propres fonds, mais la sécurité est assurée par la Chambre. On a maintenant une salle familiale aussi, on ne l’avait pas avant, pour allaiter on allait dans la « salle des époux » qui est à côté de la chambre. Mais parfois les députés la réservent pour des conférences de presse et dans ce cas les femmes qui allaitent doivent partir, si le bébé est en train de dormir il faut le lever et le déplacer…

On a aussi demandé que les votes aient lieu dès après la période des questions, et pas à finir toujours tard le soir. La semaine dernière on a eu des votes tous les jours en fin de journée, les libéraux disent travailler fortement pour la conciliation travail/famille, ça ne se voit pas ici. Ce sont des anecdotes mais c’est important, c’est ce genre de choses qui font que c’est difficile de convaincre des jeunes, et particulièrement des jeunes femmes, de s’engager en politique. On leur dit « venez, c’est faisable de concilier avec des projets de familles », c’est vrai que c’est faisable, mais est-ce que c’est facile ?, là non.

Il y a quand même quelques commissions sur votre page, j’ai notamment vu que vous apparteniez à un réseau autour de la francophonie. Y représentez vous le Québec ou bien tout le Canada ? Avez-vous travaillé avec des élus français ?

J’en suis membre depuis un an et demi, je fais partie du programme jeunesse de la francophonie. Il a été initié il y a trois ans pour permettre aux jeunes parlementaires de réseauter à travers toute la francophonie des quatre continents pour mieux comprendre les enjeux des autres pays. Et finalement on a trouvé ça tellement enrichissant qu’on s’est dit qu’il faudrait que ça nous survive, car ça devait durer deux ans mais on a consacré la troisième année à pérenniser ça en mettant sur pied le Réseau parlementaire de la jeunesse. Il devrait aboutir en juillet et d’ailleurs il y a un sénateur français qui nous a rejoint récemment, Cyril Pellevat, qui est membre du parti des Républicains.

Ma dernière question est plus personnelle, je suis bibliothécaire et j’ai vu que vous étiez membre du comité d’administration de la bibliothèque parlementaire, en quoi ça consiste ?

J’aimerai pouvoir vous le dire mais j’en suis membre depuis 2015 et ce comité… ne s’est jamais réuni ! Il est censé réunir des députés et sénateurs qui travaillent en appui des bibliothécaires et recherchistes du Parlement afin d’assurer le meilleur fonctionnement de cette formidable ressource mais je n’en sais pas vraiment plus. Depuis quelques années on a plusieurs fois demandé aux président des deux chambres d’organiser un comité, mais sans succès.

C’est réellement dommage parce qu’on utilise beaucoup la bibliothèque et les chercheurs. Trente-huit députés se sont ajoutés en 2015, qui peuvent aller à la bibliothèques et utiliser leurs services, ainsi que leurs assistants, il y a peut-être des besoins d’organisation, de ressources ou des aides à mobiliser. Mais nous ne pouvons donc pas les appuyer alors qu’on sollicite énormément leurs aide.

Enregistré le 29 avril 2018
à Ottawa.

Le Grand retour

D’octobre 2013 à juin 2015 je tenais un blog sur la politique québécoise et canadienne, blog au succès sans doute mitigé mais plutôt satisfaisant. Durant ces deux ans, j’avais pu interroger nombre d’acteurs et actrices politiques, dont les destins ont évolué (de la défaite à la victoire), pu également tenter d’éclairer les français sur le système d’outre-Atlantique et faire des chroniques d’opinion. Je m’engageais évidemment parfois pour tel ou tel – je reste fermement convaincu que le Québec doit être indépendant et de gauche (pas l’un ou l’autre) – mais a posteriori ce sont vraiment les textes dont l’objet était de comparer les systèmes (ainsi de l’article sur les suppléants, ou sur le Front national et l’indépendance) qui me semblent les plus intéressants.

En cette année électorale pour le Québec, où l’on dépasse le mi-mandat pour Trudeau au Canada, et où la France se pose des questions constitutionnelles (avec notamment la question du référendum d’indépendance en Nouvelle-Calédonie) l’envie me prend de relancer ce projet.

Beaucoup de choses ont changé depuis 2015,  mais mon intérêt (expliqué dans ce premier post en 2013) n’a pas changé et l’objectif non plus, vous trouverez ici des articles, chroniques, notes de lectures et entretiens autour de la politique québécoise et canadienne. L’axe est ouvertement militant, c’est un militant écologiste, de gauche et indépendantiste qui vous parle, ce qui n’empêchera pas de recevoir des personnes hors de ce spectre.

J’ai rechargé sur cette plateforme la majorité de l’ancien site, pas tout car c’est long, mais l’essentiel y est (notamment tous les entretiens). On retrouve toujours les textes sur la plateforme originelle, à l’abandon.

L’insoutenable légèreté du bulldozer

Lorsque la fin de l’année est arrivée tous les médias ont fait leur classement des ministres. La pratique est contestable et montre vite ses limites : ainsi un ministre se retrouve mauvais élève dans l’un et révélation dans l’autre. Plus que sur la politique en général, ce genre d’article informait sur les positionnements politiques des médias les publiant. Cependant, parmi tous, il y avait un consensus, un que personne ne voulait sauver, et qui permettait en plus de faciles jeux de mots. Yves Bolduc, ministre de l’Éducation Nationale, est unanimement dernier de la classe.

Faut-il hurler avec les loups ? Il y a tout de même de quoi, surtout que l’enfant terrible est toujours en place et continue ses joyeuses bourdes avec la légèreté du bulldozer. Sa nomination à ce poste était déjà une surprise : ancien ministre de la Santé (il avait d’ailleurs succédé à l’actuel premier ministre), il n’avait pas brillé mais était dans son champ de compétence. Pas de chance le poste avait été promis au transfuge de la CAQ Gaétan Barrette en échange de son retournement de veste… Qu’importe on a donc mis Bolduc à l’Éducation. Surprenant mais bon, il y a parfois des personnes qui se révèlent en poste.

Pour ce qui est du docteur Bolduc, outre l’affaire scandaleuse des primes incitatives qu’il a obtenu comme médecin alors qu’il siégeait à l’Assemblée, c’est avant tout la vision politique portée qui est désastreuse. On n’attendait pas particulièrement les libéraux sur ce sujet, mais sa collègue de la Culture Hélène David, si elle pratique de dures coupes budgétaires, semble le faire avec un minimum de connaissance du sujet. Là, on nage dans le grotesque permanent.

Que restera-t-il de son mandat ? Son étrange pas de deux sur les élections dans les commissions scolaires? Après avoir déclaré que le gouvernement voulait les supprimer, ils les ont finalement maintenus, mais en conditionnant leur survie à la participation (dérisoire, comme d’ordinaire). Peut-être retiendra-t-on le courage politique de celui qui vient d’annuler en dernière minute sa présence au Forum étudiant à l’Assemblée Nationale, par crainte de se faire chahuter ? Ou bien retiendra-t-on son incroyable citation proposant d’économiser le budget de l’éducation en n’achetant plus de nouveaux livres dans les bibliothèques scolaires, celle-ci en possédant déjà beaucoup ? C’est sans doute celle-ci qui marquera l’histoire, collant aux bilan du ministre comme le sparadrap aux doigts du capitaine Haddock

Ces déclarations montrent autant une bêtise et une lourdeur qu’un total mépris des interlocuteurs. Assuré d’être largement au dessus de tous, Bolduc aligne gaffe sur gaffe et reste en place, soutenu par un gouvernement que l’on peine à comprendre.

Cette légèreté de tractopelle me fait également penser à un autre gaffeur en chef qui, lui, a aujourd’hui une grande popularité auprès des médias comme des citoyens. Il s’agit de Pierre-Karl Péladeau, le futur sauveur du PQ, que l’on est obligé de croire sur parole tant son bilan est maigre. En effet, il ne s’est révélé que gaffeur et peu charismatique pour le moment. Après avoir tenter d’intercéder auprès d’acteurs d’un dossier dans l’intérêt d’une de ses entreprises il a fait amende honorable, expliquant découvrir le métier et avoir simplement voulu assurer que la société en question reste québécoise.

Par la suite il a violemment attaqué un journaliste qui s’était permis de l’appeler sur son portable, oubliant qu’en choisissant un mandat public il donnait de fait une autorisation de disponibilité et – surtout – que la pratique n’avait rien d’anormale. On peut condamner un paparazzi, mais il parait difficile d’étendre ce terme à des journalistes voulant donner la parole au sujet de leur papier et l’appelant poliment.

Qu’importe, se réclamant d’un rapport direct aux citoyens, s’exprimant avant tout par facebook, il refuse de s’excuser et rappelle qu’il est libre et ne laissera personne lui dicter sa conduite. Le discours pourrait être intéressant s’il n’était profondément hypocrite. Outre que que Quebecor, société de PKP comporte nombre de médias-poubelles, il détruit aussitôt – et toujours avec la même légèreté – son argumentaire en ne se gênant pas pour publier les coordonnés privées du Premier Ministre…

 Cela fait mal au coeur, mais j’en viens à citer un ministre libéral en diffusion. Difficile en effet de ne pas être en accord avec Jean-MarcFournier quand il déclare « C’est curieux qu’il s’époumone devant vous [les journalistes] lorsque vous utilisez son téléphone cellulaire mais il semble prêt à donner le numéro de téléphone de bien du monde… »

Image : Photo officielle d'Yves Bolduc

1. Je combat la CAQ, mais au moins sa position est lisible - suppression -, celle du PLQ est insensée et Bolduc n’aide pas à la clarifier.

Histoire : Le Parti égalité

L’actualité n’est pas pauvre en ce moment, mais entre les candidatures à la chefferie du PQ qui continuent, l’austérité toujours plus grande des libéraux et les bilans de fin d’année des ministres, il y a comme une impression de redondance. L’objectif de ce blog étant de ne pas répéter ce qui est dit partout, j’ai eu envie de faire un bon en arrière et de parler d’Histoire. Tout comme il me semble important de jouer le jeu comparatif Québec/France dans mes analyses, il m’apparaît essentiel d’avoir un peu de recul historique pour mieux saisir ce qui existe aujourd’hui. Pour cette première note historique je vais vous brosser le portrait d’un parti défunt et assez original dans son positionnement : le Parti Égalité.

Naissance du parti

À la fin de la 31e législature (1976-1981) il y a cinq partis représentés à l’Assemblée Nationale (Parti Libéral du Québec, Parti Québécois, Union Nationale, Ralliement Créditiste et le Parti national populaire), les élections de 1981 ballayeront cette diversité en instaurant le nouveau bipartisme PQ/PLQ et en rayant l’Union Nationale, ancien grand parti conservateur, de la carte. L’élection suivante (1985) confirmera ce bipartisme, le libéral Robert Bourrassa devenant premier ministre, largement majoritaire avec ses 99 députés face aux 23 péquistes formant l’opposition. Autant dire que l’ambiance est au PLQ triomphant.

Seulement, le PLQ – surtout à cette époque – reste un parti plus “à gauche” que les anciens conservateurs. Surtout, le PLQ revendique la particularité du Québec dans le Canada et contient encore plusieurs membres réellement indépendantistes*, Bourrassa doit donc jongler entre son fédéralisme clair et la revendication nationale des Québécois. Il va donc négocier les accords du Lac Meech, qui vise à faire adhérer le Québec à la Constitution Canadienne en échange de plusieurs concessions comme la reconnaissance de la « Société distincte » Québécoise. Les accords échouent mais marquent les esprits. Bourassa va aussi faire adopter la  « clause nonobstant », qui a permet au Québec d’outrepasser des lois fédérales et de conserver l’intégralité de la Charte de la langue française, notamment l’affichage unilingue.

C’est dans ce contexte que le Parti Égalité est fondé en avril 1989, quelques mois avant les élections générale. Son nom pourrait le faire passer pour un parti de gauche**, ce qui serai une grave erreur. En effet, outre l’égalité linguistique, le PÉ défendra une ligne clairement conservatrice. Mais en 1989 ce sont les questions identitaires qui sont essentielles, et elles jouent à plein, le programme du parti demande notamment :

  • L’affirmation du droit de demeurer Canadien en cas d’indépendance du Québec ;
  • L’obligation de consulter tous les Canadiens et non seulement les Québécois sur un éventuel référendum de partition ;
  • L’abrogation de la 101 (Charte de la langue française imposant le français comme seule langue officielle) ;
  • L’autorisation pour tout Québécois de mettre ses enfants dans une école anglophone (depuis le premier gouvernement péquiste, seuls les enfants d’anglophones ont ce droit) ;
  • La ratification immédiate de la Constitution Canadienne ;
  • Le rejet de la reconnaissance du Québec comme  « Société distincte » ;
  • Une  « responsabilité fiscale »  à tous les échelons, ce qui pourrait se traduire par  « moins d’impôts et moins de fonctionnaires ».

Fort de ce programme très ciblé, le PÉ présente dix-neuf candidats aux élections provinciales de septembre 1989 et, à la surprise générale, obtiennent quatre députés et manquent de peu d’en faire élire cinq autres.

 Les députés du Parti Égalité

atkison cameron
Gordon Atkinson& Neil Cameron

Si le PÉ ne s’attendait sans doute pas à un tel résultat dès le départ, les terres d’élections des députés restent peu surprenantes : il s’agit à chaque fois de circonscriptions montréalaises à très forte majorité anglophones qui votent libéraux sans hésiter depuis les années 60 (certaines depuis toujours). Il est à noter que ça n’a pas beaucoup changé, ainsi la circonscription D’Arcy-McGee est encore aujourd’hui le territoire le plus libéral du Québec, le député PLQ y ayant obtenu… 92,2% lors des dernières élections !

Quatre députés sont donc élus :

  • Gordon Atkinson, ex-militaire de 67 ans devenu journaliste sur les radios anglophones, défait le député sortant de Notre-Dame-de-Grâce avec 43% des voix ;
  • Neil Cameron, professeur d’histoire et chroniqueur cinquantenaire, qui s’impose dans Jacques-Cartier avec lui aussi autour de 43% ;
  • Richard Holden, avocat de 58 ans qui avait déjà tenté sa chance comme indépendant en 1962, puis comme progressiste-conservateur en 1976, et arrache la circonscription de Wesmount avec 40%, juste deux points devant le candidat libéral ;
  • Robert Libman, architecte et chef du parti, qui obtient plus de 57% des voix et devient, à 28 ans, un des plus jeunes députés de l’histoire ;

Le PÉ existe donc fortement à l’issu de ces élection, même s’il n’a pas du tout assez d’élus pour faire la balance du pouvoir. En effet, le PLQ conserve 92 sièges et n’a donc pas besoin de se pencher vers sa droite pour gouverner. Grand bien lui prend d’ailleurs, le PÉ explosant rapidement en vol, sans doute victime de son succès inattendu qui créé de multiples querelles d’ego minant sa crédibilité.

Cela commence en octobre 1991 ou Richard Holden est exclu pour avoir enfreint la discipline du parti. En fait, il défendait ardemment les accords du Lac Meech, contre lesquels le parti s’était en partie créé ! Siégeant comme indépendant, il rejoint le Parti Québécois en août 1992. Un choix pour le moins incongru, qui le brouillera avec sa famille et qui sera évidemment rejeté par la plupart des électeurs. Il est à noter que divers témoignages indiquent qu’il avait auparavant voulu rejoindre les libéraux.

Neil Cameron dépose bien le projet de loi 199, qui vise à faire de l’anglais et du français les deux langues officielles dans la province, en 1993, mais les combats internes rendent l’action inaudible. La violence est telle que Robert Libman – pourtant chef du parti ! -, le quitte en décembre 1993 pour siéger comme indépendant. En mars 1994 c’est Gordon Atkinson qui quitte le navire, laissant Cameron seul pour terminer la mandature.

L’élection de 1994 et l’avenir des élus

holden libman
Richard Holden & Robert Libman

Les élections de septembre 1994 sont cuisantes pour les sortants comme pour le parti qui passe de plus de 125 700 voix à à peine plus de 11 500. Pour ce qui est des quatre députés du PÉ, tous virent leur carrière politique s’arrêter brutalement lors des élections de 1994.

Richard Holden se présente pour le PQ dans Verdun (sa circonscription avait en effet changé de contours) et est largement battu par le sortant libéral. Il est cependant nommé à un poste de haut fonctionnaire à la Régie du logement par le gouvernement péquiste. Souffrant de douleurs insupportables aux dos, il se suicide en 2005 à l’âge de 74 ans.

Gordon Atkiston se représente dans sa circonscription comme indépendant mais n’obtient que 5,4% contre 73% au candidat libéral. Neil Cameron, seul resté fidèle au PÉ, n’en tire pas vraiment bénéfice puisqu’il obtient 6,15%, devancé par le PQ et un libéral caracolant en tête avec 83,6% des suffrages. Aucun des deux ne refera le saut en politique. Atkiston, doyen du groupe, décède début 2006 à 83 ans tandis que Neil Cameron continue une carrière de journaliste et chroniqueur – exclusivement dans les médias anglophones bien sûr – et a même un site sur lequel il publie régulièrement recherches et opinions.

Robert Libman est un cas à part car, malgré sa défaite honorable comme candidat indépendant – un peu plus de 30% des voix -, il contine une carrière politique. Une chose pas si étonnante si l’on se rappelle qu’en 1994 il n’a que 33 ans. S’il n’a jamais été à nouveau candidat à un poste provincial, il est maire de la commune de Côte-Saint-Luc de 1998 à 2001, date de sa fusion avec la ville de Montréal. Il devient alors maire de l’arrondissement de Côte-Saint-Luc–Hampstead–Montréal Ouest et, à ce titre, membre du bureau éxécutif de la ville jusqu’en 2005. Intervenant de temps à autres dans le débat public il appelle notamment à voter pour la CAQ en 2012 et est actuellement candidat à l’investiture pour le parti conservateur dans la circonscription de Mont-Royal en vue des élections fédérales de 2015 .

Quelle influence après le déclin ?

Bien que présentant par la suite plus d’une vingtaine de candidats, le PÉ ne réussira jamais à faire réélire un député. Tous sont largement battus et en 2003 le parti récolte à peine plus de 4000 voix pour 21 candidats. Continuant d’être enregistré au près DGEQ pendant plusieurs années, le parti perd finalement sa reconnaissance officielle en 2012.

Le PÉ n’aura donc été qu’un feu de paille, typique incarnation de ce que peut-être la politique québécoise, très prompte à renverser la table sans que cela s’inscrive réellement dans le temps, le passage de l’ADQ en opposition officielle en 2007 en est un autre exemple… Peu influent, le PÉ voit pourtant aujourd’hui ses idées assez portées par des libéraux devenus clairement anti-indépendance, voulant réouvrir le dossier constitutionnel et dont le premier ministre n’hésite plus à ne parler qu’anglais quand il est à l’étranger… On en viendrait presque à regarder Bourassa avec nostalgie.

* En 1994 Mario Dumont quitte le PLQ pour créer l’ADQ, un mouvement autonomiste qui fait campagne pour le oui lors du référendum.
** Un ami québécois peu impliqué en politique m’a avoué avoir voté pour eux parce que l’égalité lui semblait un bon concept.

Pour aller plus loin :
Site (conservé en cache) du Parti égalité
Article de CTV Montréal sur les 25 ans du Parti égalité

Crédit photo : Assemblée nationale du Québec.

Entretien avec Pierre-Luc Dusseault, député NPD de Sherbrooke

Petite rupture estivale pour un entretien avec Pierre-Luc Dusseau, en attendant la rentrée. Député de Sherbrooke, il est un des nombreux élus NPD de la « vague orange » de 2011. Mais contrairement à ce qui a pu être dit sur certains de ses collègues, ce n’est pas un élu par hasard, son engagement politique étant ancien. Il se n’attendait peut-être pas à être élu à 19 ans mais a tout de suite choisi d’assumer sa fonction. Retour sur trois ans de mandat.

En 2011 le NPD a raflé de nombreux sièges au Québec, surprenant de nombreux observateurs et parfois même des candidats. Votre cas est différent, dès le début vous y croyiez et avez fait campagne pour gagner, en vous appuyant sur un bagage politique et un territoire que vous connaissiez. Pouvez-vous me présenter votre parcours et l’origine de votre engagement ?

Je me suis engagé au NPD vers la fin de mon passage au CÉGEP. Pendant ma première année universitaire, j’ai été de plus en plus impliqué avec le NPD : que ce soit en étant un des membres fondateurs du NPD de l’Université de Sherbrooke, en participant aux différentes instances de l’aile québécoise du NPD fédéral ou en devenant Président de l’association de circonscription du NPD Sherbrooke. Je me suis joint au NPD en grande partie pour le message positif et optimiste que portait son chef à cette époque : Jack Layton. De fil en aiguille, j’ai appris à mieux connaître le NPD au point de vouloir mettre mon nom sur le bulletin de vote lorsque l’élection générale de mai 2011 est arrivée.

Ce fût une expérience exigeante mais très instructive. Dès le départ, je souhaitais obtenir le meilleur résultat possible pour notre formation politique dans le comté de Sherbrooke. J’ai fait campagne à temps plein en allant dans des endroits publics distribuer des dépliants, en faisant du porte-à-porte et en participant aux débats des candidats. Ces efforts ont porté leurs fruits, mais il ne faudrait surtout pas sous-estimer le poids que la campagne nationale du NPD, avec Jack Layton, a eu sur nos campagnes locales en tant que candidats du NPD au Québec. Ma campagne active et visible au niveau local conjugué à la popularité de notre chef m’a permis de l’emporter dans un territoire considéré imprenable.

Élu à 19 ans et onze mois, vous êtes le plus jeune député de l’histoire de la Chambre des communes. C’est un atout, mais ça peut aussi être très réducteur : avez-vous ressenti un jugement de certains ? (comme un refus de vous prendre au sérieux, ou des tentatives de vous cantonner aux questions de jeunesse…) Je pense cela autant au sein votre caucus qu’après de vos adversaires ou de vos électeurs.

Être le plus jeune député de l’histoire de la Chambre des communes a fait circuler mon histoire à travers le Canada dans les jours suivants mon élection. Des centaines de jeunes mon contacté pour me dire qu’il était inspiré par mon exploit et que ça leur donnait espoir dans le système politique actuel. Par contre, quand je suis arrivé au Parlement, ma crainte était de ne pas me faire prendre au sérieux et d’avoir de la difficulté à faire ma place. Ce n’est pas ce qui est arrivé. Probablement que si je n’avais pas pris mon travail au sérieux et que je ne m’étais pas montré comme une personne responsable, mes collègues ne m’auraient pas considéré. Mais comme j’ai pris mon travail très au sérieux et que j’ai fait mes preuves, je crois avoir gagné le respect de mes confrères et consœurs députés.

L’une des preuves de cette confiance est certainement lorsque mon chef m’a désigné comme Président d’un comité parlementaire. Ce travail me permet de gagner le respect de mes collègues de tous les côtés de la Chambre également. Est-ce que les jeunes députés ont plus de pression pour performer et démontrer leur sérieux ? Probablement. Il suffit de prendre ses responsabilités et prouver qu’on est tout autant qualifié pour faire ce travail.


Pierre-Luc Dusseault en 2011 lors de son assermentation

Le NPD est un parti progressiste, lors des dernières élections il est pour la première fois devenue opposition officielle mais le gouvernement de Stephen Harper à la majorité absolue. Afin de bien faire comprendra votre positionnement, pourriez vous donner un exemple de loi votée par les conservateurs à laquelle vous vous êtes vivement opposé ?

Le soir du 2 mai 2011, j’ai appris une très bonne et une très mauvaise nouvelle à la fois : j’ai été élu député de Sherbrooke et les conservateurs ont gagné une majorité de sièges. J’ai été amèrement déçu de ce dernier résultat. Par contre, ma réaction à quand même été positive. J’ai décidé de me retrousser les manches et de travailler encore plus fort pour faire avancer mes idées contre un gouvernement diamétralement opposé à mon Parti. Cette réalité parlementaire nous a vite rattrapé lorsque nous avons été à la Chambre des communes devant le gouvernement conservateur.

L’un des premiers combats que nous avons mené a eu lieu dès le premier mois de séance : la défense de Postes Canada. C’est une des joutes parlementaires qui m’a le plus marqué depuis mon élection. Nous avons tenu tête aux conservateurs pendant plus de 3 jours consécutifs de débats pour empêcher une Loi de retour au travail suite au Lock-out décrété par la direction de Postes Canada.

De manière plus personnelle, pouvez-vous présenter un projet de loi que vous êtes le plus fier d’avoir défendu et/ou voté ?

Oui, l’un des projets de Loi que j’ai été le plus fier de défendre a été le Projet de Loi sur le bilinguisme des agents du Parlement, présentée par ma collègue Alexandrine Latendresse. C’est un projet de Loi qui a d’ailleurs reçu la sanction royale depuis et j’en suis très fier.

Vous êtes très présent en ligne, que ce soit sur votre site, facebook, twitter, etc. Est-ce vous qui vous exprimez directement ? Si oui, pensez-vous que cela permette réellement de rapprocher élus et citoyens ?

Oui, je publie la très grande majorité des messages qui sont envoyés sur mes comptes de réseaux sociaux. Considérant les expériences que j’ai eues sur les réseaux sociaux, je peux confirmer que ce canal de communication additionnel est très utile et utilisé par mes concitoyens. C’est un nouveau moyen de communiquer directement, sans intermédiaire, avec les citoyens qui m’ont élu comme leur représentant au Parlement fédéral.

 Entretien réalisé par
courriel en juin 2014

Pour en savoir plus :
Site officiel
Page facebook

 

 

 

Entretien avec Audrey Boisvert, militante multi-fonctionnelle

Si elle s’est fait discrète depuis quelques années, Audrey Boisvert reste ancrée dans la mémoire des électeurs de Laval et du Québec. En 2005, à 18 ans, elle se présente face à l’inamovible Gilles Vaillancourt et obtient 18% des voix, les médias suivent de près cette jeune femme aux convictions bien accrochées qui n’a pas peur de se jeter dans l’arène. Une seconde étape est franchie quand elle est candidate, en 2008, pour Québec Solidaire dans Vimont en 2008 (4,3 %). Puis elle s’en va vers la Gaspésie et quitte la vie publique pour se consacrer à l’écologie concrète, une autre forme de politique. Entretien avec une militante qui n’a cessé de se battre.

Avant de parler strictement politique, peux-tu te présenter à nos lecteurs, expliquer d’où-tu viens, quelle est ta formations, quelles sont tes valeurs clefs, ce que tu fais aujourd’hui, etc. ?

Tout d’abord, je suis native de Laval, la troisième plus grande ville au Québec. Sa caractéristique principale est qu’elle est la banlieue de Montréal. Jusqu’à 16 ans, je ne me suis pas trop questionnée sur mon environnement ayant grandie dans une famille bienfaisante.

C’est entre 16 et 18 ans que j’ai premièrement acquis un esprit critique face à ma ville et à la société en général. Je me suis impliquée dans un organisme qui s’appelle le Forum Jeunesse de Laval et qui gérait de grosses sommes d’argent pour des projets jeunesses. C’est grâce à eux, entre autres, que je me suis de plus en plus intéressés à la vie politique municipale. À peu près au même âge, je suis entrée au Cégep Ahuntsic pour faire deux ans d’études en sciences humaines. J’ai participé à recréer le comité d’environnement étudiant.

En 2005, une grève étudiante s’est déroulée partout au Québec et ce fût une expérience super enrichissante qui m’a permis de rencontrer des gens ayant les mêmes valeurs que moi et aussi de participer de façon active aux événements militants. Nous avons fait la grève pendant 10 jours, dormant au cégep et participant à des manifestations tous les jours. C’était le début d’une conscience sociale et d’un devoir de participer à l’amélioration des conditions de vie pour tous et toutes.

Ensuite, en 2007, je suis allée à l’université en travail social. Ces études allaient dans le sens d’une plus grande justice sociale, d’une meilleure compréhension des enjeux sociaux actuels et d’une augmentation des outils pour réussir à faire une différence. Après mon BAC, en 2010, direction Gaspésie, région éloignée du Québec. Je me suis installée et j’ai travaillé pour le gouvernement et pour un organisme sans but lucratif. J’y ai rencontré de fabuleuses personnes! Je me suis impliquée dans plusieurs projets et organismes dont le centre de femmes de mon village Femmes en Mouvement et les soirées de slam/poésie.

Pendant mon séjour à Bonaventure, avec des amis, nous avons démarré un projet de communauté intentionnel qui s’appelle le Manoir. ( www.triple-brain.org/manoir)

Présentement, après avoir voyagé un peu partout au Québec au début 2014, je me suis installée depuis le mois de mai aux États-Unis, en Virginie, dans une communauté intentionnelle vivant et partageant mes revenus avec 100 autres personnes. Cette communauté s’appelle Twin Oaks et a des valeurs d’égalité, de féminisme et de non-violence.

Tu as dit que ta candidature en 2005 avait « marqué l’imaginaire collectif », ce qui est indéniable. Au delà de ton âge, le fait de n’avoir pas d’expérience politique et d’être une femme étaient autant de handicap dans un monde politique macho, vieillissant et peu ouvert, et pourtant tu as obtenu un score très honorable. Comment est-née cette candidature, et comment as-tu décidé d’y aller ?

Cette candidature est née surtout à cause d’un excellent momentum entre ma vie, mes implications, mes amiEs et la politique de ce temps-là. Avec des amis, au printemps 2005, nous étions allés à une simulation du conseil municipal lavallois organisé par le forum jeunesse de Laval (dont je faisais partie) Après cette scéance, nous nous étions amusés à imaginer les prochaines élections municipales (en novembre 2005) en présentant 200 candidatEs. Vu qu’il faut seulement 200 signatures pour se présenter aux élections, on pensait que chaque personne pourrait signer pour les 199 autres! C’est de là qu’est partie l’idée.

Donc, on arrive en septembre où j’obtiens facilement 200 signatures de personnes de mon cégep. Je me suis donc présentée au greffier de la ville qui recevait les candidatures. Rendue là-bas, le monsieur m‘a dit: es-tu certaine de vouloir faire cela? Ça engendre des coûts aux lavallois!! Dans ma tête, je pensais :  »Oui, oui, la démocratie, ça l’a un coût monsieur, vous avez raison. » Lui, il prenait pour Gilles Vaillancourt. Je me demande ce qu’il est devenu maintenant!

Quelques heures après être allée porter ma candidature, je me demandais: Mais comment je vais faire pour que les lavalloisEs sachent que Gilles Vaillancourt n’est plus la seule option? Je me disais que j’allais peut-être organiser une conférence de presse à un moment donné. Dans tous les cas, je ne devais pas dépenser d’argent puisque j’avais un budget 0. Finalement, un journaliste m’a contacté la journée même pour me poser des questions sur ma candidature. Le lendemain, plus de journalistes m’ont contactés. Finalement, quand je revenais de l’école, j’avais souvent des messages d’une dizaine de journalistes.

Je trouvais important de répondre aux journalistes, pour permettre aux gens de savoir qu’il y avait une alternative. Je n’ai jamais pensé gagner et je ne voulais pas être mairesse de Laval non plus. Mais, c’était primordial de militer en faveur d’un meilleur urbanisme, d’une démocratie saine ainsi que d’une meilleure protection de l’environnement.

Ta candidature a soulevé l’intérêt de tes concitoyens, puisque tu as obtenus 18% des voix, mais aussi des médias. Comment as-tu géré cette soudaine « célébrité », ne t’es-tu pas souvent sentie réduite au rôle de « candidate la plus jeune du Québec » ? Aujourd’hui quel bilan tires-tu de cette campagne ?

En fait j’ai eu 16% des voix. Ce qui équivaut à environ 12 600 personnes.

On peut donc dire que j’ai marqué l’imaginaire de mes concitoyen-nes, des médias et aussi des habitant-e-s du Québec. Cette campagne électorale n’en était pas vraiment une. Je n’ai pas serré de mains, je ne suis pas allée dans un centre de personnes âgées, j’avais 0$ de budget. Dans le fond, je participais activement à ce qui m’était proposé par les journalistes.

Sérieusement, depuis cette expérience, je pense que les médias influencent à au moins 16% les votes. Les gens ne me connaissaient pas, ils auraient pu voter pour les 4 autres candidats qui se présentaient en même temps que moi, mais les médias parlaient surtout de moi. Il était donc plus simple, si on ne voulait pas du maire sortant, de voter pour la personne qui avait le plus de visibilité.

En repensant à la campagne, je pense aussi à tous les mauvais articles de journaux qui sont sortis sur moi avec plein d’erreurs à l’intérieur. C’est un peu troublant d’avoir une conversation avec un journaliste qui, par après, écrit un article avec des phrases que je n’ai pas dites ou des informations fausses. Ça me questionne vraiment sur la véracité de ce qui sort dans les journaux ou à la télévision !

2010-05-19-10-09-10-4bf3f1066da34AngBoisvert_-Audrey en 2008 lors de la campagne provinciale
(Article sur le site du 
Courrier de Laval)

En 2008, tu rejoins Québec Solidaire pour les élections provinciales et te présentes dans Vimont, une décision commentée et vue comme une « belle prise ». Mais au-delà de cette réduction médiatique, qu’est-ce qui t’as fait rejoindre QS et où en es-tu avec ce parti aujourd’hui ?

En 2008, j’habitais encore à Laval et le parti de Québec Solidaire n’était pas un parti très connu. Avant les élections, aucun député n’avait été élu. C’est en 2008 que le parti a reçu environ 5% des votes et a eu son premier député: Amir Khadir. Dans le fond, je m’intéressai à ce parti dès sa formation, puisque c’était celui-ci qui me rejoignait le plus dans mes valeurs. Étant à Laval, je savais que je n’avais aucune chance d’être élue et c’était tant mieux parce que je ne voulais pas rester 4 ans de plus à la banlieue !

Encore aujourd’hui, QS est le parti qui est le plus prêt de moi. Avec son plan de sortie du pétrole, ses prises de décisions humanistes, féministes et pour un Québec plus égalitaire, c’est aussi dans ce sens-là que j’ai le goût d’aller pour la société. C’est sûr que le système électoral tel qu’on le connaît a fait ses preuves quant à son incapacité à résoudre la crise environnementale et à répondre aux besoins fondamentaux de tous et toutes. Québec Solidaire participe à ce système lui aussi, mais il est surtout une petite roche dans l’engrenage bien huilée.

Présentement, en 2014, 3 députés de QS ont été élus et je suis sûre que leur travail sera bénéfique pour la société en général. Pendant les élections en mars 2014 j’étais en Gaspésie et j’ai aidé la candidate de QS, Patricia Chartier, dans sa campagne. Notamment à écrire ses discours pour les débats publics. J’étais contente d’aider une telle candidate, très à gauche dans le parti. Après avoir eu les résultats des élections qui indiquaient que les libéraux étaient majoritaires, Patricia mentionnait qu’on devrait retourner dans la rue pour faire valoir nos intérêts, parce que c’est comme ça que les libéraux nous avaient habitués. J’ai aimé ce discours et oui, il faut s’organiser entre les élections !

Au delà-de cet engagement politique, ta vie en Gaspésie est aussi au plus près de tes convictions, notamment écologistes. Peux-tu nous expliquer ce qui a décidé ton départ de Laval et ce que tu construis à Bonnaventure ?

Mon départ de Laval s’est fait graduellement. C’est en 2008 que je suis partie de Laval pour déménager à Montréal dans un collectif (coop sur généreux). Ensuite, après mes études en travail social, j’ai décidé d’aller vivre en campagne puisque c’était un rêve que je chérissais depuis plusieurs années. Pour moi, la banlieue (Laval est le paroxysme de ce concept) n’est pas fait pour moi puisque c’est un endroit où l’individualisme, la culture de consommation et la non-valorisation de l’environnement dominent l’espace. J’avais le goût que mon mode de vie soit plus ancré avec mes valeurs.

La Gaspésie m’attirait particulièrement, tout le monde y passe ses vacances, pourquoi je ne passerais pas un bout de ma vie là-bas? Alors, depuis 2010, mon domicile stable (quand je ne suis pas en voyage) est situé dans le village de 3000 habitants de Bonaventure. J’ai pu créer un jardin, avoir des poules, cueillir des champignons sauvages, aller à la pêche, fabriquer une toilette compostable chez moi. Toutes ces choses et même plus encore sont possibles puisque j’habite en campagne.

À Bonaventure, j’ai travaillé comme travailleuse sociale et intervenante pour les jeunes. J’ai aussi vécue avec plusieurs personnes dont 8 à l’été 2013. J’ai toujours aimé vivre en commun et je pense que le faire peut être un acte politique. Vivre ensemble, c’est éloigner un peu plus l’individualisme de ma vie et nous rendre tous et toutes plus fort-e-s. Je ne me suis pas impliquée beaucoup en politique dans les quatre dernières années. Mais je ne suis pas restée indifférente à ce qu’il se passait autour de moi et même plus loin, à Montréal pour la grève étudiante de 2012 par exemple.

Bien que retirée des affaires publiques, tu y es brièvement revenue l’an dernier, quand Gilles Vaillancourt et une grande partie de son conseil sont tombés pour corruption. Par un slam et un entretien au Devoir tu as appelé les citoyens de Laval à se réveiller. Pourquoi as-tu ressenti le besoin de sortir ainsi de te réserve ? Et penses-tu un jour revenir en politique active ?

Lorsque Gilles Vaillancourt a été accusé de gangstérisme, j’étais très contente qu’enfin il se passe quelque chose sur ce sujet. Les lavallois-e-s en parlaient depuis plusieurs années. Jusqu’à maintenant, il n’y a pas eu de comparution, mais j’ai très hâte de voir comment cela va se passer. Avec tout l’argent qu’il s’est fait, on peut facilement croire qu’il pourra se payer les meilleurs avocats pour se défendre !

Pour moi, cette histoire d’élection municipale de 2005 est chose du passée et c’est un journaliste du Devoir qui m’a contacté pour une entrevue. Je trouve ça important de répondre aux journalistes, ça donne une voix à une autre façon de voir la politique, du moins à Laval ! Par hasard, quelques semaines avant cette entrevue, j’avais écrit un slam sur Laval, ma ville natale pour nos soirées de slam à Bonaventure. Je l’ai proposé au journaliste qui a tout de suite voulu le publier. (vous pourrez bientôt visionner un court extrait de mon slam dans le film l’Espouère de Moïse Marcoux-Chabot)

Outre cet événement médiatique anecdotique, je ne pense pas vraiment retourner en politique-électorale- active. Je vois la politique avec un œil différent où les citoyen-ne-s ont aussi du pouvoir sur les décisions des députés et ministres. Je suis politisée, active dans mes réflexions et essayant de mettre à l’avant des manières alternatives de vivre. Je pense pouvoir aider parfois le parti de Québec Solidaire puisqu’eux seuls peuvent être une roche dans l’engrenage si bien huilée du système électoral québécois. (je veux enlever la dernière phrase.)

Personnellement, je ne pense pas me représenter comme candidate pour bon nombre d’années encore. Néanmoins, je ne veux pas mettre de côté la possibilité d’être un jour candidate dans mon village avec une équipe de gens voulant vivre différemment.

Entretien réalisé
en mai-juin 2014

Pour aller plus loin :
– Slam et rencontre avec Audrey après la démission de Gilles Vaillancourt ;
Lespouère, film de Moïse Marcoux-Chabot où l’on croise la communauté où Audrey vit actuellement.

Crédits photos : Audrey Boisvert en 2013 et Courrier de Laval